Même optimiser les apports d’engrais est l’adage en agriculture, cette année, avec le contexte économique actuel, les pratiques sont encore plus à surveiller. « Pour optimiser l’engrais, il faut avant tout valoriser au mieux ce qu’on apporte, lance Grégory Vericel, ingénieur chez Arvalis. Il convient donc de freiner la volatilisation et la lixiviation. »
Bien choisir son engrais pour optimiser les apports
Pour optimiser les apports d’engrais, il faut tout d’abord être attentif à la forme des engrais apportés. L’urée est moins volatile que la solution azotée et que l’ammonitrate, par exemple. Mais s’il n’y avait que ce paramètre à prendre en compte, ce serait facile ! Entre ces trois formes d’azote, leurs disponibilités pour la plante et leurs actions (rendement et taux de protéines) sur les céréales, notamment, diffèrent.
«De nombreuses études en céréales ont montré que, sur le plan de l’efficience de l’absorption de l’azote, l’ammonitrate sort gagnant devant l’urée et encore plus devant les solutions azotées, annonce Arvalis dans l’une de ses publications. C’est encore plus significatif lorsque ces deux dernières formes n’ont ni d’adjuvant, ni d’enrobage. »
Cependant, en blé, l’urée est légèrement moins efficace pour gagner des protéines. Sur toutes les cultures, il est préconisé de fractionner l’apport, toujours dans le but de fertiliser au plus près des besoins de la plante. Ceux-ci sont définis par les objectifs de rendement et de qualité des céréales, mais aussi par la variété.
Ralentir les réactions chimiques
Pour tenter de coller le plus possible aux besoins de la plante, il existe des inhibiteurs d’uréase. Cette molécule chimique ralenti la réaction qui transforme l’urée en ammonium. « C’est prouvé et plutôt bien efficace, annonce l’ingénieur d’Arvalis. Au lieu d’avoir une accumulation d’ammonium à la surface du sol, celui-ci va se dissoudre petit à petit dans le sol pendant une semaine. On note parfois, tout de même, un pic de volatilisation mais il reste moins élevé. »
Autre piste dont Arvalis fait référence dans une note, les urées enrobées. « Ces produits mettent progressivement à disposition l’azote minéral pendant le cycle de la culture. Cela peut permettre de s’affranchir en partie du fractionnement et d’économiser un passage d’épandeur, et donc du carburant. »
L’application de l’engrais dans de bonnes conditions climatiques va le rendre plus efficace. « Le temps chaud, sec et venteux favorisera la volatilisation, explique l’ingénieur. Le top, c’est d’apporter l’azote avant une pluie, lorsque la plante en a vraiment besoin. »
C’est là où le bât blesse. D’une part, la météo est difficile à anticiper et d’autre part, les besoins de la plante sont difficiles à évaluer. Ils dépendent de la vitesse de croissance de la plante, de sa capacité d’absorption. Ainsi que de la vie microbienne du sol et sa capacité à minéraliser l’engrais.
Peu de connaissances sur la vie du sol
Sur ce dernier point, il est encore trop tôt pour connaître tous les mécanismes des micro organismes. « On s’intéresse beaucoup à cette faune mais on en sait encore très peu, avoue Grégory Vericel. On sait qu’apporter de la matière organique, du carbone donc, favorise l’activité du sol. Mais dans ce sol, il y a des bactéries pathogènes également et celles responsables de l’humification. Or, l’équilibre entre celles bénéfiques et les autres ne doit pas être bousculé. »
Les biostimulants font partie de ces fertilisants qui se basent sur l’activité du sol. Il en existe quatre types : ceux qui agissent sur les bactéries qui captent l’azote, sur la décomposition de la matière organique, sur la croissance racinaire des plantes et sur les gênes responsables du stress.
Essais peu significatifs
« Nous effectuons de nombreux essais chez Arvalis, estime Grégory Vericel. Aucun ne semble être significatif quel que soit le type de produit. Il peut y avoir un intérêt dans certaines conditions ou à un certain moment, certes. Mais sur le long terme, on a du mal à mettre en évidence ces effets. »
D’où l’importance de réaliser des analyses à la sortie de l’hiver et ainsi ajuster le bilan et ses apports. « Outre la quantité d’azote disponible dans le sol à cet instant, il est intéressant de connaître la quantité de matière organique qui y est présente, d’estimer le rapport C/N et de savoir quelle est la quantité d’azote minéralisée, conseille-t-il. Il est également pertinent de connaître la teneur en autres éléments dans le sol. Comme la potasse, le phosphate, le magnésium ou encore le pH. »
Optimiser les apports d’engrais : le potentiel redox, une bonne piste ?
Certains agronomes se penchent en ce moment sur le potentiel redox du sol. Lié au pH, il permettrait d’améliorer la vie du sol et la nutrition des plantes. « C’est un aspect très difficile à étudier car nous ne pouvons pas réellement mesurer le potentiel redox d’un sol. Il n’est jamais stable, commente l’ingénieur. Cependant, cette perspective demande à être étudiée, cela a peut être un intérêt. Mais le plus difficile reste de le mesurer à l’échelle de la parcelle. »
En période de prix élevés, il ne faut pas oublier l’engrais organique. « Attention à bien analyser les produits avant de les épandre, alerte Grégory Vericel. Avec des données fiables, il est plus facile d’ajuster la dose d’engrais à apporter. »
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