OP ET AOP laitières, encore au milieu du gué

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OP ET AOP laitières, encore au milieu du gué

Entre le marteau des laiteries et l’enclume des producteurs, la vie des présidents d’organisations de producteurs n’est pas une sinécure. Et ça bouge encore !

Si «l’ennui naquit un jour de l’uniformité», on ne risque pas de s’ennuyer en ce moment sur le front des organisations de producteurs (OP)! En effet, le paysage reste à la fois divers et mouvant. Depuis l’avènement des contrats en 2011, elles se sont pourtant affrontées à de dures réalités. A l’époque, les coopératives avaient fait valoir que les liens avec leurs livreurs se feraient via le « contrat coopératif ». Le dispositif des contrats individuels, puis de création des OP (une chronologie que d’aucuns auraient préféré inversée), n’a donc concerné que les éleveurs livrant à des laiteries privées…

Leur mission : face à la fin des quotas, négocier prix et volumes avec les acheteurs. Chaque OP s’est ainsi trouvée face à un industriel… et dans un cadre d’action très «bordé» par le mix-produit(1) et les tactiques, incluant parfois des achats hors OP, desdits industriels.

La gestion des volumes, c’est l’autre fardeau dont ont hérité les OP… sans avoir toutes les clés de la maison! D’où, par exemple, l’appui apporté par certaines, aux offreurs et acheteurs de références. «La cessibilité des contrats s’est avérée nécessaire même si elle est peut-être ponctuelle», justifie Jean-Michel Yvard de l’Oplglo(2). Satisfait aussi que son OP ait pu obtenir parallèlement le maintien d’une attribution de volume contractuel de 200.000 litres pour les jeunes.

Les Aop mises en place trop tardivement

Les associations d’organisations de producteurs (Aop) verticales ou horizontales ont mis plus de temps à se créer. Dès 2013 pourtant, la fédération nationale des producteurs de lait (Fnpl) y voyait une pierre indispensable à la construction de l’organisation d’après-quotas et en avait même proposé des statuts. Mais entre producteurs, on n’a pas toujours été d’accord sur leur périmètre et leurs missions… Les réticences de certains pans de l’administration, craignant le risque d’ententes illicites, n’ont pas contribué à accélérer le mouvement.

Un sentiment d’inachevé

Commandé par le ministère de l’Agriculture, un rapport du conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (décembre 2015), donne ainsi des premières années des OP, un sentiment d’inachevé : «Le point d’équilibre entre producteurs et acheteurs s’est largement déplacé au détriment des producteurs. A travers la contractualisation, les entreprises se sont assuré un approvisionnement ajusté à leurs débouchés, mais sans toujours répondre aux attentes des éleveurs de stabiliser leur revenu et de leur donner plus de visibilité.»

Si elles sont suivies d’effet, quelques préconisations de ce rapport pourraient donner de nouvelles armes aux OP. Il en va ainsi de la proposition d’un «contrat-cadre» unique, précisant les relations entre OP et collecteur, et instaurant un volume OP, là où certaines entreprises s’en tiennent farouchement à des conventions. On suggère aussi de faire évoluer le calcul du prix dans les futurs contrats.

Un contrat cadre OP-collecteur

Certaines OP ont ainsi commencé à travailler sur de nouveaux indicateurs de prix, adaptés au mix-produit de leur collecteur. D’autres imaginent un futur où l’on irait chercher des marchés de complément pour les éleveurs souhaitant des volumes en plus. «Il s’agit de construire avec nos collecteurs une relation mature et gagnant-gagnant», explique Gilles Durlin, membre du bureau de la Fnpl et président de l’OP Bailleul. «Cela peut se faire en identifiant des besoins précis correspondant à des marchés précis… et à une valorisation partagée. Cela permettrait de ‘bétonner’ le revenu sur une première part des volumes. Ceux des éleveurs qui souhaitent se développer au-delà pourraient le faire mais dans le cadre d’un second contrat, avec, en face, un second prix.»

Que les Aop se développent est un autre souhait, assez largement partagé, au moins sur l’approche territoriale. «Les OP pourraient y partager les informations clés sur les marchés et volumes, remarque Gilles Durlin. Et y chercher ensemble des solutions pour répondre aux défis respectifs de zones en déprise ou au contraire en surplus…»

(1) mix-produit : positionnement produits/marché.

(2) Organisation des Producteurs Lactalis du Grand-Ouest.

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