Le diagnostic de Michel Duru, directeur de recherche à l’Inrae, est sans appel sur les questions agricoles et alimentaires. Mais il a souligné qu’il y a du potentiel pour les cuma pour atteindre la neutralité carbone, lors de son intervention à l’AG de la fdcuma640.
Michel Duru a commencé par détailler le concept « one health ». « One health », en anglais, signifie « santé unique ». Un concept qui insiste sur l’interdépendance entre les équilibres -et donc la santé- de l’environnement, des populations animales et végétales et des humains.
Carbone et santé unique
« Tout est lié, » a souligné Michel Duru. « Les crises de la santé humaine et de la santé de la planète sont interdépendantes. » Sans oublier de rappeler que « les activités humaines sont responsables de ce problème ».
« Entre 1990 et 2015 on a réussi à diminuer nos émissions de CO2 de 0,5% par an. Cette diminution, pour atteindre la neutralité carbone en 2050, doit être amplifiée par un facteur 10. Il ne s’agit plus d’améliorer le système alimentaire mais de le refonder, » a-t-il alerté.
Le chercheur a également fait le lien entre la dégradation de la santé global et l’appauvrissement microbien, qu’il s’agisse du microbiote digestif des humains, des animaux ou de la biodiversité des sols.
Neutralité carbone et santé
Au niveau alimentaire, les solutions, appuyées par des résultats scientifiques solides (larges cohortes et méta-analyses) sont connues. Des produits beaucoup moins transformés, des céréales complètes, beaucoup plus de légumineuses, et moins de viande.
« Moins de viande, mais mieux », a insisté le chercheur. Il a évoqué dans sa présentation le rôle des prairies. Mais aussi les apports nutritionnels qualitatifs importants des animaux nourris à l’herbe ou issus des filières Bleu-Blanc-Cœur. C’est à dire bénéficiant de rations contenant du lin, aboutissant à des produits contenant plus oméga-3 notamment.
« L’élevage n’est pas un souci, c’est davantage sa concentration qui pose problème », a-t-il analysé. Avant de détailler un modèle dans lequel les cuma pourraient s’insérer. Celui « d’agroécologie en commun, à l’échelle du paysage », et de « collaboration entre petits territoires ». Il s’est pour cela appuyé sur des études conduites en Aveyron et dans le Tarn-et-Garonne.
Agroécologie en commun
« Ce type de collaborations, entre des petits régions à dominante céréalière et d’autres à dominante élevage, peut avoir des bénéfices multiples. En termes d’échanges, ou d’unité de méthanisation bien dimensionnées par exemple. »
« Mais ces échanges butent souvent sur la question de la logistique. Et c’est là où, notamment, les cuma pourraient avoir une place à prendre. Tout comme sur la conception d’outils ou des assolements en commun, avec des parcelles longues et étroites pour favoriser les échanges entre les espèces. »
Après le NutriScore, l’EcoScore
Les agriculteurs présents n’ont pas manqué de souligner le retard des organismes de recherche -dont l’Inrae- à se saisir des questions d’agronomie. Certains professionnels sont en effet engagés dans les techniques sans-labour depuis des dizaines d’années, et ont manqué de références.
Pascal Guichemerre, de la cuma Adour-Gascogne, a pour sa part souligné le fossé entre intentions et comportements des consommateurs. « Le confort non-essentiel a un impact énorme sur le climat, » a-t-il indiqué.
Un constat non-réfuté par Michel Duru, qui a ajouté que « le gouvernement est en train de travailler sur un Eco-Score [à apposer sur les produits proposés dans les espaces de vente, ndlr]. Des gens se battent pour que les services apportés par l’agriculture soient pris en compte dans ce futur score. Cela va être un indicateur très puissant pour orienter les comportements d’achat des consommateurs. »
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