« Je me suis installée en 2015 par passion. On est entré en 2016 dans l’organisation de producteurs Saint-Père », raconte à l’AFP cette jeune brune énergique, qui en est devenue la présidente en février 2019.
Le projet de lait équitable, co-construit entre la chaîne de distribution Intermarché et les éleveurs partenaires de la Laiterie Saint-Père d’Agromousquetaires en Loire-Atlantique, était de vendre des briques de lait à 88 centimes avec la garantie que les éleveurs en toucheraient la moitié. « Notre exigence, c’était d’avoir un prix rémunérateur de 44 centimes. Après il fallait que ça colle avec un prix de vente », se rappelle l’éleveuse laitière, installée à Avessac.
En un an, 20 millions de briques de lait ont été vendues. Quatre fois plus que les 5 millions prévus lors du lancement en février 2018. Pourquoi ça marche? « Parce que c’est simple », répond Elodie. Le consommateur « sait comment est réparti l’argent ». C’est écrit en gros sur la brique.
Autre facteur de réussite de la marque « Les éleveurs vous disent Merci »: les portraits de cinq des éleveurs, visibles sur les briques, qui permettent aux consommateurs de mettre un visage sur les produits.
« Continuez, on est avec vous »
Et ça entraîne des conséquences inattendues. « Les retours sont nombreux. Pour nous, cela se traduit souvent par des appels à la ferme, d’abord pour savoir si on est vraiment des agriculteurs et si on touche bien les 44 centimes », raconte Elodie. « J’ai reçu aussi beaucoup de courrier et de messages de soutien », poursuit-elle. « La dernière en date, c’est une carte de voeux: une personne a découpé sa brique de lait et nous l’a fait parvenir avec un message en disant: ‘J’achète ce lait et je le consomme tous les jours, continuez, on est avec vous’. C’est super valorisant », s’enthousiasme Elodie.
Autre bonne nouvelle, les performances commerciales de la marque ont permis, après la première année, de reverser aux 180 éleveurs partenaires 1,5 million d’euros au prorata du volume de lait livré et de leur date d’adhésion. « Nous avons choisi symboliquement d’inviter nos adhérents à un repas et ils sont repartis chacun avec l’ordre de virement de leur prime », explique Elodie.
Pour elle et ses associés, la prime représente 20.500 euros. « Elle va permettre de payer les factures en attente et de moderniser l’exploitation. On va investir dans des ventilateurs pour le confort des animaux l’été, un investissement qui, jusqu’ici, était resté au second plan. »
L’expérience lui a aussi permis de découvrir d’autres mondes. Il y a « une prise de conscience de l’ensemble de la filière. Des atouts et des contraintes que chaque maillon peut avoir. Quelque part, ça m’aide à avoir une certaine ouverture d’esprit et à donner une autre dimension à notre métier », estime-t-elle.
Mais ce succès n’efface pas toutes les difficultés. Elodie et son mari doivent préparer le départ à la retraite de leurs associés, dans deux ans. Il faudra pour cela, soit racheter leurs parts, soit trouver un associé pour partager le travail.
« Ma politique en m’installant, c’était de rendre l’outil attractif. Notre grande crainte, c’est de ne pas trouver de nouveaux associés » car « on aspire nous aussi à une vie de famille, du temps libre et des vacances », témoigne Elodie.