Alexandre Jucquois, de l’AGC Cuma Centre Ouest est intervenu mi-octobre devant un parterre de comptables pour décrypter les points-clé de la fiscalité agricole. Les résultats comptable 2021, devraient en effet être positifs pour un certain nombre d’exploitations, notamment en grandes cultures. Ce qui incitera probablement certaines d’entre elles, à vouloir défiscaliser.
Défiscaliser: le poids significatif des cotisations MSA
Alexandre Jucquois, a d’abord expliqué les modalités de calcul du résultat fiscal. Il a présenté les trois régimes actuels d’imposition en vigueur:
- Le micro BA (moins de 82.000€ de chiffre d’affaires).
- Le réel simplifié (82.000€ à 352.000€ de chiffre d’affaires).
- Le réel normal (plus de 352.000€ de chiffres d’affaires).
Puis, il a expliqué la détermination des cotisations MSA (maladie, accidents, prestations familiales, vieillesse, retraite complémentaire, CSG et RDS). En comparaison, la MSA représente des montants généralement plus importants que l’impôt sur le revenu payé au titre du foyer fiscal de l’agriculteur imposable.
«Pour un agriculteur célibataire sans personne à charge et sans autre revenu, dégageant en moyenne 22.000€ de revenu par an, l’impôt sur le revenu sera de 6% (1ère tranche imposable à 11%) et le taux net de MSA à 35%. Soit en rythme de croisière un taux moyen de prélèvements obligatoires d’environ 40%» cite par exemple le représentant de l’AGC Cuma Centre Ouest.
Proportionnel au revenu
Ces cotisations obligatoires sont proportionnelles au revenu (avec une assiette minimale pour certaines d’entre elles). Les cotisations « retraite » représentent la plus grosse partie. Au total, 21,11% si on cumule l’AVA(*) plafonnée (11,55%), l’AVA déplafonnée (2,24%), l’AVI (**) (3,32%) et la RCO(***) (4%). Mécaniquement, plus le montant des cotisations retraites sera modeste, plus vos prestations retraites risquent d’être réduites jusqu’à un certain plancher. Cette conséquence n’est pas toujours mise en évidence dans les choix de gestion.
«Précisons aussi que pour tirer pleinement profit de l’économie de prélèvements obligatoires, l’exploitant concerné devra dégager un revenu supérieur à l’assiette minimum de cotisations obligatoires, cumulée à l’amortissement annuel moyen que générera l’investissement envisagé» insiste Alexandre Jucquois.
Une fiscalité agricole accommodante
Dans les situations où l’agriculteur dégage un revenu clairement positif, l’argumentaire du conseiller de gestion qui incite celui-ci à acheter du matériel pour atténuer les prélèvements obligatoires est étayé comptablement. A première vue tout du moins. En effet, la fiscalité agricole est assez accommodante.
Elle donne notamment la possibilité d’amortir intégralement un matériel agricole en un faible nombre d’années, même si celui-ci a toutes les chances de garder une valeur marchande en fin de période d’amortissement ! Gonfler les charges d’amortissements annuelles est donc un bon moyen de limiter le revenu professionnel déclaré. Un système avantageux, sauf si vous êtes taxables aux plus-values professionnelles (chiffre d’affaire supérieur à 250.000€).
Une prise de risque !
Toutefois, au-delà de l’incidence potentielle sur votre futur niveau de retraites, un investissement non justifié au regard des besoins réels de l’exploitation, constitue une prise de risque. Or, dans un contexte où les retournements de tendance économique, deviennent fréquents, ce risque peut menacer la pérennité de l’exploitation.
D’autres choix sont possibles. Ainsi, moderniser ses bâtiments d’élevage pour qu’ils deviennent plus fonctionnels, entraînera également des charges déductibles. Et ceci, tout en générant du mieux-être quotidien. Dans le même esprit, l’embauche partagée d’un salarié en groupement d’employeurs qui va créer également des charges salariales déductibles, contribue également à diminuer les impôts. Et en même temps l’astreinte de travail.
Défiscaliser: les outils pour réguler les prélèvements obligatoires
Enfin, avant de surinvestir dans du matériel agricole qui serait peu utilisé, il convient d’examiner les divers dispositifs qui existent pour réguler les prélèvements obligatoires. Citons:
- La possibilité de modifier les modalités de dépréciation comptable d’un bien en cours d’amortissement (passer du linéaire ou dégressif).
- L’opportunité de changer de date de clôture d’un exercice comptable pour décaler éventuellement la prise en compte dans la déclaration, des revenus exceptionnellement élevés une année.
- L’option en faveur de la moyenne triennale fiscale et sociale. L’assiette de l’impôt et des cotisations sociales sera alors égale à la moyenne des bénéfices de l’année d’imposition et des deux années précédentes.
- Le choix de contracter une DPE (Déduction pour Epargne de Précaution) pour un plafond maxi de 150.000€. Cela impose en parallèle un placement obligatoire sur un compte spécifique de 50 à 100% de la déduction.
Dans l’espoir de minimiser absolument les impôts et la MSA, certaines exploitations cèdent à une certaine frénésie d’achats de matériels. Ce biais explique peut-être le niveau de mécanisation actuel de l’agriculture française, sensiblement supérieur à celui d’autres pays agricoles concurrents.
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(*) assurance vieillesse agricole
(**) assurance vieillesse individuelle
(***) retraite complémentaire obligatoire