A l’occasion du Forum de la Mécanisation au printemps 2017, des agriculteurs du territoire Béarn – Landes – Pays Basque ont exposé leurs solutions (individuelles ou collectives) pour avoir accès à du matériel de dernière génération tout en maîtrisant leurs charges. Le développement de la mécanisation s’inscrit dans un accroissement de production, de débit de chantiers, mais aussi, et surtout, de confort de travail.
Mécanisation : quelques repères
Actuellement, dans le contexte d’absolue nécessité de contenir les charges, les solutions collectives d’acquisition, de partage ou d’utilisation du matériel représentent une réelle bouffée d’oxygène. La mécanisation représente 40 à 50 % des charges de structures d’une exploitation. C’est un point sur lequel le chef d’exploitation peut agir en fonction de la stratégie d’équipement choisie. Le poste traction est le plus important. A lui seul, il représente la moitié des charges de mécanisation.
Traction maîtrisée = mécanisation maîtrisée
En moyenne, une exploitation a des charges de mécanisation entre 350 et 450 €/ha SAU (source Mécagest). Ces chiffres varient très fortement en fonction des stratégies d’équipement choisies. Les organisations collectives sont les plus rentables économiquement. Les groupe tracteurs intégraux permettent de réduire fortement les coûts de revient tout en bénéficiant de matériels performants et disponibles : les résultats sont là avec des facturation à hauteur de 180 et 200 €/ha pour l’intégralité du matériel, carburant compris.
Une seule entité
Ces résultats ne s’obtiennent que par l’optimisation du matériel. La clé est de travailler en groupe comme s’il n’existait qu’une seule entité, soit sous forme d’entraide (structure en banque de travail), soit en ayant recours à de la main-d’oeuvre salariée faisant le lien entre les adhérents. Sans cette dynamique collective de travail, le seul partage économique du matériel ne permettra pas d’optimiser au maximum les coûts de revient, mais également le confort de travail.
Avis, Philippe Frachou administrateur stagiaire cuma Garralda
Un groupe de cinq jeunes exploitants s’est investi au sein de la cuma dans une branche d’activité traction fin 2016. «Cela a commencé avec un groupe de voisins, dont l’un fait du gavage. On l’aide à charger et décharger les canards. Pour ma part, j’ai acheté un tracteur de 85 ch mais on a de gros outils à la cuma, épandeur, tonne. J’étais limite avec mon tracteur. Et nous avons commencé à parler d’acheter un tracteur en chargeant et en déchargeant les canards. L’un avait un vieux tracteur en copropriété. D’où l’idée de faire travailler un tracteur à 5 en cuma. Avec 6 mois de recul, ça se passe bien.»
Pourquoi s’orienter sur de la traction en commun ?
Le tracteur de 135 ch est attelé à de nombreux matériels différents. Il nous fallait de la puissance pour les tonnes et épandeurs, pour le labour aussi, on a une charrue 4 socs en cuma. Pour le roundbaler, c’est mieux d’avoir de la puissance, notamment en pente. On a fait un planning sur l’année, pour vérifier que tout passait à cinq. S’engager, c’est bien mais il faut que ça passe.
D’autres ont plus puissant que moi sur leurs exploitations donc tout fonctionne. Le fuel, on prend et on rend le tracteur avec le plein. On est parti sur 100 heures chacun. Qu’on les fasse ou pas, on les paie. Au bout de 6 mois, on est à 320 h, cela devrait passer. L’objectif est de réaliser 500 h/an pour un coût de revient de 20 €/h. Pour mon exploitation, cela représente une charge de 2 000 €/an pour bénéficier de ce tracteur.
Nous avons aussi ouvert le tracteur aux autres adhérents. Il faut qu’ils soient engagés sur un outil attelé de la cuma et on vient leur faire la conduite avec ce tracteur. Par exemple, on a fait un peu de labour cette année.
Trateurs Low-Cost et options minimales
Bon nombre d’agriculteurs ne peuvent pas ou ne pourront plus (à court terme) s’offrir des tracteurs de dernière génération, sauf en décidant de privilégier cet investissement au dépend d’autres nécessités sur l’exploitation ou des besoins personnels, voire en risquant de se mettre en danger économiquement. Les constructeurs ont compris la situation et en comparaison à l’industrie automobile, des gammes de tracteurs à bas coût sont désormais sur le marché, mais également des marques nouvelles proposant des tracteurs basiques à des prix abordables.
Avis, Bernard Baillet « Presqu’un assolement en commun »
Bernard Baillet est installé à Samadet (Landes), sur une exploitation d’une cinquantaine d’hectares en polyculture-élevage (gavage canards, taurillons) . Il a fait le choix de s’associer avec son voisin Jean-Marc Drouilhet en banque de travail.
Quand et comment avez-vous démarré ?
En 2012. Jean-Marc était disponible pour les travaux de mise en cultures mais n’avait plus le matériel adapté. Pour moi, c’était l’inverse. Pour nos deux exploitations, nous avons une centaine d’hectares à mettre en cultures. Grâce aux services de la fédération des cuma, nous avons structuré notre entraide en comptabilisant tous nos échanges (main-d’oeuvre + matériels). Ce cadre nous permet de travailler sereinement l’un pour l’autre, tout en régularisant notre échange à la fin de chaque année.
Quel regard portez-vous sur ces 5 premières années ?
Que du positif ! Et cela à tous les niveaux. Sur le plan humain, cette organisation m’a permis de réduire fortement la pression printanière. Le cumul astreinte journalière des travaux d’élevage et mise en cultures représente un stress important. Pouvoir partager avec un autre cette période et savoir que l’on peut compter sur lui soulage énormément. Positif aussi sur le plan financier. Désormais, nous raisonnons notre mécanisation à deux. Tous nos derniers investissements ont été réalisés dans le cadre de la copropriété, avec des matériels performants (épandeur d’engrais avec Dpae et système de pesée).
Au niveau de la traction, nous avons accès à un tracteur de 180 ch et une herse rotative 5 m d’une cuma de l’Aveyron. Nous réalisons cette intercuma par le biais de la cuma de Samadet. Ce service nous revient à 22 €/h pour le tracteur (hors carburant) pour 220 h/an et une disponibilité de 4 mois (de mars à juin).
Quel avenir voyez-vous pour cette organisation ?
Jean-Marc et moi-même avons des enfants qui participent activement. Ils nous poussent à aller plus loin et les derniers investissements sont à leur initiative. Nous arrivons presque à raisonner comme un assolement en commun. Nous échangeons beaucoup sur les itinéraires culturaux, les choix des semences, les plans de fumure… Nous souhaitons poursuivre cette organisation car elle correspond pleinement à nos attentes.
Cette organisation est-elle reproductible ailleurs ?
Totalement. Mais quel que soit le nombre de participants, la base de ce modèle d’échange, comme les autres (cuma, copropriété, société…), c’est la communication. Il faut parler, échanger, s’écouter. Sans cette règle simple, le résultat ne sera jamais optimum, au contraire il peut se révéler négatif.
Retrouvez prochainement sur Entraid.com l’intégralité de l’édition spéciale Landes Béarn Pays Basque.