SyreN prévient les pertes de nutriments lors des épandages d’effluents liquides. Fin août, Mauguin présentait le concept de traitement venu du Danemark à propos duquel «nous avons signé un partenariat avec Biocover pour le développement en France.» Philippe Cha, directeur général du fabricant de tonnes à lisier était appuyé par Morten Toft, le concepteur du système qui avait fait le déplacement à Lamballe (22). «Au Danemark, on ne peut plus déposer le lisier sur l’herbe à moins qu’il ait été acidifié. A l’avenir il faudra injecter le lisier ou l’acidifier certainement pour toutes les cultures. Il y a aussi une démarche qui s’engage dans une région en Allemagne pour généraliser ce système…» ont-ils présenté pour assoir leur solution aux pertes d’éléments par volatilisation, lixiviation et lessivage.
Moins d’émissions d’ammoniac
Du constat que le pH de l’effluent impacte sa composition, Biocover a conçu un outil qui régule automatiquement ce paramètre lors de l’épandage. Sur le cycle de l’azote, l’acidité pousse l’équilibre ammonium / ammoniac vers l’ion le moins volatil et mobile dans le sol, l’ammonium, qui est aussi assimilable par les plantes. «On vise un pH de 6,4» précise la présentation. Selon la nature du produit initial, la dose d’acide sulfurique utilisée sera de l’ordre de 1 à 2,5l/m3 pour des lisiers. Dans le cas de digestats, plus basiques, ce sera plutôt au-delà de 5l/m3.
Conserver la valeur du lisier
Outre l’acide, l’innovation repose sur l’incorporation d’un additif. Plusieurs sortes sont disponibles pour différents objectifs, par exemple pour travailler sur la réduction des odeurs ou retarder le phénomène de transformation de l’azote ammoniacal en nitrate. «L’inhibiteur d’azote prolonge de quelques semaines la période pendant laquelle la plante peut absorber l’ammonium», explique encore Kevin Gremy (Mauguin).
«SyreN est la seule alternative économique à l’injection du lisier dans le sol», lancent ses promoteurs, tout en rappelant que les conditions lors de l’épandage impactent fortement la perte d’ammoniac. Sur son site, Biocover propose un calculateur en ligne qui donne une idée du niveau des émissions selon les conditions rencontrées. «Dans les situations défavorables, SyreN peut diviser par deux les émissions par rapport à un épandage classique par pendillards», entre autres leviers de gain à prendre en compte. «En ajoutant de l’acide sulfurique lors de l’épandage on réduit le besoin de fertilisation soufrée ensuite. C’est particulièrement intéressant pour du colza ou des prairies notamment»…
Des situations spécifiques
Mais si, sur le papier, transformer aussi bien la déjection en produit, parait tout à fait intéressant, sur le terrain, la solution ne devrait toutefois pas s’imposer de manière universelle du jour au lendemain. En premier lieu, les récipients d’acide et de lisier ne devant pas être sur le même véhicule, impossible de l’envisager sur un automoteur. Ne serait-ce aussi qu’au regard des coûts d’investissement avancés, «il faudra s’orienter vers un format de tonne assez grand. Il faudra aussi un certain niveau d’équipement, par exemple qu’il y ait un débimètre…», glisse Gilles Guillerme, responsable commercial Mauguin. Enfin, dans le cas d’un groupe cuma avec des éleveurs en bio, ces adhérents ne pourraient pas valoriser l’équipement: le process n’est pas reconnu par leur label.
Le matériel en trois parties
Sur le relevage avant du tracteur, un caisson symbolise le SyreN. Via la commande du système (normé Isobus) qui peut intégrer une interface déjà présente en cabine, il alimente l’injecteur monté sur la tonne. «Ce n’est pas un système qui se bricole. Les interventions sur ces pièces devront se faire par des personnes habilitées», avertit l’équipe du constructeur mayennais. Et toutes les tonnes du marché ne pourront être compatibles, «par exemple dès qu’il y a un circuit de recyclage, on ne peut pas monter ce système.» Lors du mélange, une réaction immédiate s’enclenche. «En 0,2 secondes, on double la pression.»
Le caisson est construit autour d’un réservoir de type IBC qui contient l’acide sulfurique. En plus de ce mètre cube d’acide, il abrite deux cuves de 300 l pour l’eau de rinçage et pour l’additif. Chargé, c’est une masse de 3t qui pèse sur le relevage avant du tracteur. Pour contrer le déport de 1,50m, le caisson est muni de 2 caméras latérales qui permettent au chauffeur de voir plus facilement s’il peut s’avancer dans les carrefours.
Sans manipulation de produit dangereux
Toujours par rapport à la sécurité, aucune manipulation du produit n’est nécessaire de la part de l’opérateur. Les cuves pleines sont livrées fermées par le fournisseur et doivent être chargées et branchées telles quelles dans le caisson. «On ne peut pas poser une cuve d’acide sur un plateau agricole pour aller ravitailler la tonne, avertissent les présentateurs. Pour ne pas rentrer dans le cadre du transport de produit dangereux, il faut impérativement que la cuve soit transportée avec l’outil de travail derrière.» Une équation logistique s’ajoute sur les chantiers, notamment ceux où un ravitaillement en lisier s’envisage. Le conseil du constructeur aux prestataires de travaux pourrait être de faire livrer les IBC directement chez leur client leur pour faciliter la logistique. Car si pour du lisier, 1000 l d’acide peuvent suffirent pour une journée, dans le cas de digestat, la cadence sera plutôt d’une recharge tous les 10 voyages.
Pour plus d’informations, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com.
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