Vu que le matériel coûte plus cher, autant l’utiliser. En une décennie, le prix du tracteur moyen livré dans la cour des cuma a quasiment augmenté de moitié. L’ordre d’idée « est assez représentatif pour pas mal de matériels », observe Stéphane Chapuis, responsable du pôle AgroEcoTech de la fncuma. Surtout, la cadence s’accélère. De 1,5 à 2 % d’inflation (en année glissante) en temps normal, « ce qui reste supérieur à l’inflation monétaire », l’indice officiel de l’Insee – l’indice des prix d’achat des moyens de production agricole concernant les matériels (Ipampa) – enfle plutôt sur un rythme de 3 % sur les cinq dernières années, voire au-delà de 7 % ces derniers mois selon le type de matériels. Ainsi, l’Ipampa Matériels se place actuellement à un niveau supérieur de 23 % par rapport à son niveau d’il y a dix ans, ou de 5,7 % par rapport à l’an dernier.
Les coûts des chantiers touchés par l’inflation
De surcroît, « ceci reste très loin de ce que nous observons », la hausse réelle à laquelle se confrontent les acheteurs de matériel agricole est deux fois plus importante que ce qu’indique la référence de l’Insee, selon l’expert du réseau cuma. En effet, l’Ipampa ne prend pas en compte les évolutions technologiques, ni les adaptations aux nouvelles normes. Or ce sont des causes très ‘impactantes’ sur ces hausses de prix. Immanquablement, ces hausses ont des répercussions sur les coûts des chantiers dans les exploitations.
Pour autant, elles ont accès à des leviers pour limiter cet impact. « Déjà, ce constat remet sur le devant de la scène la question de bonne durée de détention des matériels. Du seul point de vue économique, nous avons tendance à renouveler trop vite. » Le référent des cuma pense en premier lieu aux outils sur lesquels l’évolution technologique est limitée et le risque de pannes lourdes modeste.
Pour du matériel de transport ou des outils de travail du sol, prolonger la détention grâce à une remise en état serait souvent une décision plus abordable que le remplacement. Sur des matériels plus sensibles, notamment des automoteurs, l’amélioration technologique ainsi que le besoin de fiabilité modifient les données de l’équation. Néanmoins, même eux pourraient raisonnablement connaître des carrières un peu plus longues dans les cuma.
Avoir une idée précise des attentes du groupe
Savoir renouveler le matériel au bon moment est donc l’un des trois premiers conseils à appliquer pour gérer un parc de cuma. C’est une décision qui se prend plutôt deux ans en amont que trois mois ! « Douze ou dix-huit mois avant d’acheter, on doit savoir qu’on va renouveler », insiste Stéphane Chapuis. Et il faudra se présenter à son potentiel fournisseur muni d’une idée précise et claire de ses attentes.
« Dire au concessionnaire ‘j’ai un tracteur à changer’ est très loin de suffire. » La capacité à synthétiser les attentes du groupe et l’analyse du besoin seront en effet à la base d’un élément incontournable de l’investissement réussi : le cahier des charges. Bien entendu, « il faut aussi savoir négocier, sans dériver de ce besoin. »
Le conseiller préconise par ailleurs de demander d’isoler la reprise de l’achat, ou encore, de « ne pas subir des devis valables quelques jours. » Mais avant toute chose, l’expert identifie la saturation du matériel comme le levier numéro un de l’efficience.
Pour accéder à un coût de chantier économique, il faut un outil performant, utilisé au niveau de son potentiel. « Entre un usage individuel et une utilisation en cuma, on franchit donc déjà une étape importante dans l’optimisation du coût. Ensuite, d’autres logiques permettraient d’aller plus loin. »
Stéphane Chapuis évoque par exemple des regroupements d’activité, ou le développement d’un service de prestation, sans éluder toute la complexité de concrétiser ce genre de projets. Toujours est-il que les détenteurs d’un semoir monograine taillé pour 250 à 400 ha/an et qui ne l’utilisent que pour 50 ha/an sont loin d’être une exception. « Nos services réalisent des suivis avec des boîtiers connectés. »
Confort ou performance : les coûts des chantiers varient
Clairement, l’analyse identifie souvent que le cultivateur de maïs s’imaginant semer en moyenne 2 ha/h avec son outil six rangs n’en couvre en réalité qu’un par heure. « Quand le groupe n’a pas de chauffeur, le semoir doit changer de tracteur entre chaque adhérent… il perd la moitié des fenêtres par rapport à une prestation bien huilée qui permet de rationaliser aussi le parc. »
Ainsi, entre une stratégie axée sur le confort, et une autre sur la performance, « le coût final du matériel à l’hectare peut facilement passer du simple au double », conclut Stéphane Chapuis. Aux agriculteurs de savoir où ils mettent le curseur, et leur argent.
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