« On attend des messages forts »: à peine arrivé le matin, le président de la République a été abordé par des représentants de la FNSEA, syndicat agricole majoritaire, et des Jeunes Agriculteurs. « Nous attendons de vivre du prix de nos produits. On ne cesse d’être stigmatisés », lui a lancé un agriculteur, un autre évoquant « la colère du monde agricole ».
« Rien ne doit justifier des actions contre nos paysans, rien. Et je serai intraitable sur le sujet », a assuré M. Macron.
Interpellé lors de sa déambulation sur moult sujets brûlants – retraites, Politique agricole commune (PAC), pesticides, « gilets jaunes », accords commerciaux internationaux, « agribashing » – il poursuivait samedi soir, douze heures après son arrivée, son tour des exposants, dûment commencé par un passage obligé auprès de l’égérie du Salon, la vache charolaise Idéale.
Un agriculteur l’a remercié de n’avoir « rien lâché hier soir »: le chef de l’État est revenu vendredi de Bruxelles, où se négociait le budget de l’Union européenne pour la période 2021-2027, sans accord sur le maintien de l’enveloppe de la PAC dont il a fait sa priorité, car les 27 pays de l’Union n’ont pas pu s’entendre.
« La PAC ne peut pas être la variable d’ajustement du Brexit », a martelé devant les agriculteurs le président, alors que l’équilibre de la profession repose largement sur les neuf milliards d’aides européennes que touche la France.
« Mieux vous organiser »
Interrogé aussi sur les retraites des agriculteurs, il a jugé « impossible » de revaloriser les pensions actuelles à 85% du Smic, une mesure prévue dans le futur système mais qui coûterait trop cher à appliquer aux agriculteurs déjà à la retraite: ce serait 1,1 milliard d’euros, a-t-il déclaré – si l’on inclut les pensions des retraités actuels et de leurs conjoints.
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Mais il a ensuite fait une ouverture: « Nous devons trouver un mécanisme de financement aujourd’hui. Mais je suis tout à fait ouvert et je souhaite qu’on y travaille, et sur le sujet du stock, c’est-à-dire les retraités actuels, je ne pense pas qu’il faut le mettre dans le système des retraites, mais dans la loi de financement de sécurité sociale, on peut un peu améliorer les choses », a avancé M. Macron.
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Aux éleveurs bovins qui tentent actuellement de développer leurs exportations pour être moins dépendants d’un acteur tout-puissant, le groupe d’abattoirs Bigard, il a lancé: « Vous êtes dans la main de Bigard (…), vous devez mieux vous organiser entre vous ».
Auprès de viticulteurs très inquiets, touchés par des sanctions douanières punitives américaines et qui réclament 300 millions d’euros de compensations pour couvrir le manque à gagner sur leurs exportations aux Etats-Unis, leur premier client, le chef de l’Etat s’est engagé à « porter la demande d’un fonds de compensation auprès de l’Union européenne » et à « faire en sorte que d’ici le printemps ce fonds de compensation puisse se mettre en place », a déclaré Jérôme Despey, viticulteur et secrétaire général de la FNSEA.
M. Macron devait aussi rencontrer dans la soirée des pêcheurs, que le Brexit risque de priver d’une large part de leur gagne-pain.
Il a aussi promis de recevoir à l’Élysée un groupe de « gilets jaunes », ce qui serait une première, lors d’un vif échange avec une femme l’interpellant sur les retraites, le Référendum d’initiative citoyenne (Ric) et les violences policières.
« Cadre apaisé »
Quelques instants plus tard, Eric Drouet, figure historique des « gilets jaunes » a été expulsé par des policiers du Salon, sans avoir réussi à approcher le président, puis placé en garde à vue pendant plusieurs heures pour rébellion avant d’être relâché.
Sujet d’actualité brûlant pour les agriculteurs, le président a été interpellé sur les zones de non-traitement (ZNT) aux pesticides près des habitations, effectives depuis le 1er janvier. Il a suggéré que les bandes de terres agricoles non cultivées en raison des interdictions d’épandage puissent à l’avenir être « valorisées », promettant que les agriculteurs seraient « accompagnés » financièrement et s’est engagé à assurer une « sécurité juridique » pour que les prochains semis se fassent « dans un cadre apaisé ».
« Il nous faut une agriculture forte parce que les Français veulent savoir ce qu’ils mangent. On est dans une transformation historique », a déclaré Emmanuel Macron. « Il y a de l’impatience d’une partie de la société française (…). Mon rôle est de réconcilier tout ça ».