La « loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous » (Egalim), votée en octobre, est issue d’un intense travail de réflexion lancé depuis juillet 2017.
Ce texte a été élaboré par l’ensemble de la filière agro-alimentaire, des producteurs aux distributeurs en passant par les consommateurs, durant les Etats généraux de l’alimentation (EGA), en réponse à la grave crise qu’a connue l’agriculture française en 2015 et 2016 et au désespoir des agriculteurs qui, à bout, vont parfois jusqu’au suicide.
Lancé au début du quinquennat pour redonner du pouvoir d’achat aux agriculteurs et éleveurs en crise, cet ambitieux chantier avait pour vocation de sortir d’un effet domino intenable: la guerre des prix entre les quatre grands de la distribution en France les pousse à réclamer des prix toujours plus bas auprès de leurs fournisseurs de l’industrie agro-alimentaire, qui, eux-même achètent à leur tour le plus bas possible la matière première agricole auprès des paysans, en bout de chaîne.
Le président Emmanuel Macron a accompagné ce chantier d’une obligation pour les filières agroalimentaires de se réorganiser pour peser davantage dans les négociations en recourant systématiquement aux contrats commerciaux, tout en se réorientant vers des pratiques d’agriculture plus durables.
Bon an, mal an, toutes les filières ont fini début 2019 par lui remettre un « plan de filière », listant leurs engagements communs et leurs projets de développement sur cinq ans.
En retour, elles attendaient de pied ferme l’issue des négociations commerciales annuelles sur les prix entre la grande distribution et les industriels qui s’achèvent chaque année le dernier jour de février.
Résultats mitigés
Las, pour la première année d’application de la loi Egalim, les résultats se sont avérés très mitigés.
Si la filière laitière s’en est plutôt mieux sortie, avec la signature de contrats tripartites garantissant des prix stables aux éleveurs, les autres secteurs de production agricole estiment que le compte n’y est pas.
« L’espoir que nous avons, c’est qu’on tire enseignement de tout ce qui ne va pas bien dans tous les autres produits que le lait pour faire mieux l’année prochaine. Il reste encore une pression à la baisse exercée par certains distributeurs, et je dis bien certains, parce qu’il y en a de plus vertueux que d’autres », a déclaré la semaine passée la présidente de la FNSEA Christiane Lambert, à l’issue d’une réunion de suivi des négociations commerciales réunissant distributeurs, industriels de l’agroalimentaire et agriculteurs à Bercy.
Le syndicat agricole majoritaire estime que la hausse du Seuil de revente à perte (SRP), l’encadrement des promotions en prix et en volume et l’interdiction de prix abusivement bas, sont des outils indispensables à une contractualisation rénovée pour permettre la prise en compte des coûts de production des agriculteurs et une meilleure répartition de la valeur tout au long de la chaîne alimentaire.
Tous s’accordent cependant sur le fait qu’il faudra laisser du temps à cette loi, dont la plus grande partie des mesures s’appliquent à titre expérimental pour deux ans, avant de voir des résultats positifs concrets « dans les cours de ferme », en amont de la filière.
« Nous sommes à l’année N, cette année N montre qu’il y a des avancées sur le lait, mais ces avancées ne sont pas encore répercutées comme il le faudrait chez les agriculteurs, donc il faudra progresser l’année prochaine », a constaté le ministre de l’Agriculture Didier Guillaume, à l’issue de cette même réunion.
Sur le volet environnemental de la loi, le conseil des ministres examinera également mercredi des ordonnances sur la séparation des activités de conseil et de vente des produits phytopharmaceutiques, sur la réorganisation des coopératives, et une autre étendant les pouvoirs de police judiciaire des agents du ministère de l’Agriculture en matière de contrôles.