La sobriété en intrants : voici ce qui a fait décoller la réflexion de la coopérative tarnaise du Grenier de l’Albigeois sur le lin oléagineux, dès 2007. Parmi les objectifs du Grenelle de l’environnement, figure la réduction de l’utilisation de phytos de 50 % en 2018. « Nous avons mené une réflexion pour accompagner nos adhérents vers cet objectif », précisait Daniel Maurel, directeur de la coopérative, lors d’une visite d’essais variétaux en mai 2014. Réflexion consolidée par un travail sur la qualité et la traçabilité de l’alimentation du bétail des adhérents. Depuis fin 2011, la coop mise donc sur le lin et produit de l’extrudé dans son usine de Saint-Juéry, à destination de ses éleveurs, mais aussi des fabricants d’alimentation animale. « Aujourd’hui, la graine est produite avec de la traçabilité, de la qualité, de la teneur en oméga 3. » Vincent Lecomte, de Terres Inovia (ex-Cetiom), précisait qu’en France, seuls 20 % des besoins en lin sont couverts. « Il se positionne comme une culture de diversification, ici contractualisée : un atout quand le prix des grains est de plus en plus volatil. » En 2014, la coop a garanti à ses adhérents 530 e/ha en lin, et annonce 450 e minimum cette année, pour des charges opérationnelles s’échelonnant de 350 à 450 e/ha selon Terres Inovia.
Mécanisation minimale
L’itinéraire de cette culture, réservée aux terres à réserve utile moyenne à haute, est de mieux en mieux maîtrisé. Des optimisations restent possibles sur le positionnement des éventuels fongicides. Elle s’insère facilement dans le calendrier de travail, avec un semis entre le 1er et le 20 octobre. « Le lin requiert un semis classique, si ce n’est qu’il demande très peu de travail du sol : c’est un pivot, explique Olivier Massoutié, responsable Productions végétales au sein de la coop. Si le sol bouge, il peut se casser. La culture demande peu d’interventions. Le désherbage se maîtrise bien, à partir du moment où l’on intervient précocement car les doses homologuées sont faibles. C’est un excellent précédent : les agriculteurs témoignent de rendements supérieurs sur les cultures suivantes, par exemple + 5 q/ha en blé. » Il lève les doutes concernant la récolte de cette plante fibreuse : « Lorsque l’itinéraire technique est respecté, le lin n’est pas plus haut que le genou, grâce à l’application d’un régulateur de croissance, une étape-clé. On le bat au mois de juin, par forte chaleur si possible, à une vitesse adaptée, avec une lame normalement affutée. Les résidus de chaumes dans ces conditions ne posent pas de problème. » Des itinéraires mieux maîtrisés mais qui n’empêchent pas les surprises, comme en 2014/2015 : le beau potentiel entrevu en début de saison a donné lieu à un remplissage des capsules de 40 % inférieur aux attentes. Un accident qui a aussi affecté les colzas, lié aux basses températures de mai et à la sécheresse de juin. Ce qui, selon Olivier Massoutié, ne devrait pas émousser l’intérêt des 70 adhérents, mobilisés sur cette culture autour de 800 ha (doublement des surfaces depuis 2014) : « 14 q/ha, ça ne paraît pas formidable, mais le lin engendre peu de frais. En marge, l’agriculteur fera mieux qu’en colza ou tournesol sec. »
Manuel Dona, agriculteur dans le Tarn : « le sol s’améliore »
« Je ne travaille pas le sol : j’ai réalisé le semis en combiné début octobre derrière céréale. C’est une culture qui aime les sols tassés. J’ai vu une grosse amélioration de la souplesse du sol : le pivot agit un peu comme celui de la luzerne. Je l’ai vu surtout dans mes parcelles « fortes » (avec du rocher), où je retrouve de la souplesse même 3 ans après. »