« L’offre a plus que doublé depuis deux ans. Au Salon international de l’Alimentation (Sial) près de Paris, le nombre de produits innovants à base de légumineuses a plus que doublé cette année, passant de 11 à 24 », indique à l’AFP Xavier Terlet, président du cabinet XTC World innovation qui analyse les tendances mondiales.
« Ca a démarré en 2016, c’est l’explosion aujourd’hui », confirme Nicolas Trentesaux, le directeur général du réseau Sial, organisateur de la manifestation.
« Avec 10 milliards d’habitants dans le monde à venir et l’impact écologique de la production de viande, il est certain que beaucoup de start-ups se sont mises à réfléchir sur la question des protéines », ajoute-t-il.
Car les légumineuses apportent des protéines aux consommateurs, notamment occidentaux, qui ont tendance ces dernières années à manger moins de viande, tout en contribuant à absorber l’azote de l’air et stocker le carbone dans le sol.
« C’est bon pour la santé, c’est bon pour la planète », renchérit auprès de l’AFP Sylvain Goyet, chargé du développement commercial de la jeune pousse française Hari & Co.
Celle-ci avait remporté lors du précédent Sial une médaille de l’innovation pour son steak de lentilles et poursuit depuis sa croissance: son chiffre d’affaires de deux millions d’euros en 2018 devrait plus que doubler pour atteindre cinq millions en 2019, selon la direction.
Parmi les nouveaux produits qu’elle propose cette année aux visiteurs du monde entier, des soupes de lentilles, pois chiches, ou haricots rouges. Alors que l’offre était cantonnée à des produits classiques, « elle va désormais sur toutes les familles de produits », souligne M. Terlet.
« Maintenant, vous avez des pâtes aux légumineuses, des soupes fraîches aux légumineuses, des pâtes à tarte aux légumineuses… Ces produits s’adressent aux flexitariens », qui mangent moins de viande, mais de meilleure qualité. Selon lui, en France, « plus de 45% de la population » a augmenté ces dernières années sa consommation de produits végétaux.
Et ça ne semble pas prêt de s’arrêter: « le marché mondial des matières protéiques végétales (MPV) progressera au rythme annuel moyen de 5,5% d’ici 2020 pour frôler la barre des 11 milliards d’euros », selon les prévisions des experts du cabinet Xerfi.
Les revendeurs de viande intéressés
Outre le caractère éco-responsable des protéines végétales, « plaisir et santé ne s’opposent plus », explique M. Trentesaux.
« Nous pensons qu’un steak de soja peut être aussi bon qu’un burger de boeuf Angus », explique sûr de lui Gert Jan Gombert, directeur commercial de Vivera, une société hollandaise qui expose crânement ses substituts de viande, cerné par les industriels du t-bone steak et du rumsteak.
Lorsqu’on lui demande si ces derniers ne prennent pas ombrage de la présence en ces lieux d’une concurrence sortie de terre, sa réponse fuse: « Toutes les plus grosses entreprises du secteur de la viande veulent faire du business avec nous ».
« J’ai eu pas mal de revendeurs intéressés, qui commencent à penser à proposer des gammes comme celle-là à des bouchers », déclare de son côté à l’AFP Stefan Geubel, chargé de l’export pour Vegetarian Butcher, un autre groupe hollandais dont l’étal décoré de nappes en vichy propose à la dégustation des morceaux de « poulet » à base de soja.
Certaines entreprises du commerce de la viande ont déjà franchi le pas et ne s’en cachent pas: seule une mince cloison sépare le stand du groupe néerlandais Zendbergen, d’un barbecue improvisé par la société californienne Beyond Meat, dont il distribue les burgers végétaux en Europe.
« Nous sommes un fournisseur de protéines », répond simplement Adriaan Figee, responsable commercial de Zandbergen. « Ce n’est pas un remplacement, c’est une nouvelle offre dans notre portefeuille », résume-t-il à l’AFP.
« Je reste convaincu qu’on est omnivore et que dans certaines régions, on va manger moins de viande mais de meilleure qualité, mais parallèlement dans le reste du monde, on est plutôt en sous-consommation, donc le marché de la viande va encore largement se développer », estime M. Trentesaux. « Il faudra qu’on développe d’autres sources de protéines », conclut-il.
A charge pour les algues et protéines d’insectes, déjà visibles au Sial, de prendre à leur tour le relais lorsque les consommateurs occidentaux seront prêts à tester massivement de nouvelles saveurs.