C’est la première fois depuis la fin des quotas qu’il y a la mise en œuvre d’une régulation de la production » de lait en Europe, a souligné devant la presse Stéphane Le Foll, qui plaide depuis des mois pour ce type de mesures afin de résorber la surproduction.
La baisse de 5% sera calculée par rapport au dernier trimestre 2015. Les éleveurs qui s’engageront à réduire leur production pourront bénéficier d’aides financières destinées à compenser le nombre de litres de lait non produits. Cet argent viendra en majeure partie de l’enveloppe de 500 millions d’euros annoncée le 18 juillet par la Commission européenne pour l’agriculture en crise, dont une grande partie est destinée au secteur laitier. La France a obtenu une enveloppe spécifique de 50 millions d’euros.
Bruxelles prévoit de payer aux éleveurs 14 centimes par litre de lait non produit. La France rajoutera un bonus de 10 cts/l pour ses éleveurs, dans la limite de 5% de la production, a expliqué M. Le Foll. Paris utilisera pour cela l’enveloppe de près de 50 millions d’euros allouée par Bruxelles en juillet, que le gouvernement va doubler avec des crédits nationaux pour atteindre un total d’environ 100 millions, a-t-il précisé. Concrètement, un éleveur qui s’engagerait à produire 100 litres de lait en moins, touchera 24 centimes/l sur les 5 premiers litres (aide européenne et bonus français), puis 14 centimes/l sur les 95 litres suivants (aide européenne uniquement).
M. Le Foll a souligné avoir choisi de fixer l’objectif de baisse à 5% seulement, car il « ne souhaite pas la restructuration de la production laitière française » avec la disparition d’élevages. Si les éleveurs étaient incités à réduire leur production de plus de 5%, ils pourraient en effet considérer qu’il vaut mieux ne pas poursuivre leur activité et mettre la clé sous la porte. A ce niveau, il est également possible de réduire la production de lait en modifiant l’alimentation des vaches plutôt qu’en les envoyant directement à l’abattoir, a expliqué le ministre. Or l’abattage d’un grand nombre de bêtes risquerait d’engorger le marché de la viande bovine et de faire chuter les prix. Des mesures spécifiques pour cette filière seront annoncées dans les prochains jours. Les éleveurs devront déclarer la réduction de production de lait qu’ils envisagent pour le dernier trimestre 2016 avant le 21 septembre par téléprocédure. Ces aides vont peut-être redonner « un brin d’espoir », a estimé Thierry Roquefeuil, président de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL, majoritaire). Si cette réduction de l’offre « devient vraiment une politique de tous les pays (européens), cela aura du sens », a-t-il souligné. Les autres Etats doivent bientôt présenter leurs plans et la grande interrogation concerne les Pays-Bas et l’Irlande, en pointe dans la hausse de production.
Pour Josian Palach, de la Confédération paysanne (minoritaire), le pas est « positif mais pas suffisant, il aurait fallu qu’au niveau de l’Europe on réagisse plus tôt ». Après avoir explosé en 2015, la production de lait a commencé à décroître légèrement en Europe depuis le début de l’année (environ 2% en moyenne selon le ministère), notamment en France, Allemagne et Pologne, pays qui avaient poussé pour la mise en place d’instruments de régulation. La France est le 2e producteur européen après l’Allemagne, avec environ 25 milliards de lait par an (16% de la production européenne). Elle compte 3,7 millions de vaches laitières et 4,1 millions de vaches à viande (allaitantes), réparties dans 66.000 exploitations. On dénombre environ 130.000 éleveurs laitiers, souvent regroupés à plusieurs dans une même ferme. Une ferme laitière moyenne produit 400.000 litres de lait par an.
Paris, 30 août 2016 (AFP)
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