Recherche et développement
Cette unité de méthanisation, si elle est nouvelle dans la cuma depuis 2022, occupe les esprits de ses adhérents depuis bien plus longtemps. « 2010, je dirai, se souvient Julien Gauthey, président de la structure, qui a laissé sa place de président de cuma. Pendant une dizaine d’années, la cuma nous a permis de faire groupe, mais aussi d’investir dans de la recherche et du développement. »
En effet à ce moment-là, les exploitants, qui utilisent du matériel d’épandage en commun, voient chaque année les quantités d’effluents augmenter. Cela demande une mise aux normes, des investissements en matière de stockage, mais aussi une gestion des réticences de la part du voisinage concernant les odeurs. C’est aussi l’époque où la méthanisation questionne et semble valoriser les effluents d’élevage. « Nous voilà donc motivés pour étudier le dossier, réaliser des enquêtes de faisabilité, imaginer l’ouvrage, négocier avec GRDF, visiter des unités de méthanisation, explique le président. On décide alors de se donner les moyens en créant un fond dédié à cette activité d’un montant total de 30 000 €. »
Finalement, au bout de cette étude, le groupe tombe dans une impasse. Sans système d’injection, l’unité de méthanisation ne peut être rentable. Or, le réseau de gaz ne s’y prête pas. L’idée reste dans la tête jusqu’en 2018, quand GRDF annonce une modification de son réseau, et la possibilité pour les agriculteurs d’injecter du gaz. Après vérification de la motivation de tous, la cuma entre donc dans une nouvelle dynamique et une autre dimension.
Une méthanisation 100 % effluents
Ce projet est vu sous plusieurs aspects. Le premier est un investissement et une diversification possible grâce à un prix sécurisé pendant 15 ans. Les revenus sont assurés. Ensuite, la production d’énergie avait un sens pour ce groupe. « Nous avions des effluents à valoriser, les transformer en gaz tombait sous le sens, admet Julien Gauthey. Cela permet une meilleure acceptabilité de nos activités. D’autant plus que nous approvisionnons le méthaniseur uniquement avec les effluents de nos élevages. »
Toute l’organisation de la cuma prend un autre virage dès 2019, avec la signature du contrat de gaz avec GRDF. Julien Gauthey laisse sa place de président de cuma à Christophe Mauchand en 2020 pour se consacrer davantage aux travaux de réalisation de l’unité de méthanisation. La cuma décide d’investir dans un bâtiment et des locaux jouxtant l’unité de méthanisation, pour ne faire qu’un. « C’est la société de méthanisation qui loue les bureaux et une partie des bâtiments à la cuma pour maintenir son activité », précise Julien Gauthey.
Nouveaux matériels
Salle de réunion, sanitaires, atelier et stockage de matériel, la cuma investi mais ne s’arrête pas là. Une partie de la toiture accueille des panneaux photovoltaïques. Avec l’arrivée de ce nouvel adhérent, la cuma revoit également son parc de matériel en prévision d’une hausse des volumes d’activité, mais aussi pour répondre aux besoins spécifiques d’une unité de méthanisation.
« On a investi principalement dans des matériels de transport et d’épandage, reconnaît Quentin Villot, trésorier de la cuma. On a ainsi acheté des tonnes à lisier, des épandeurs, des bennes et des tracteurs. Mais aussi un semoir à semis direct pour les cultures dérobées, une bineuse, une station météo, etc. Tout cela dans le but de faire évoluer nos techniques. La cuma devient plus forte qu’avant. » En deux ans, la valeur du parc de matériel a presque doublé, passant de 800 000 à 1,5 M€.
Entre-temps, l’unité de méthanisation sort de terre en un peu plus d’un an, sur un terrain vendu par le trésorier de la cuma. En septembre 2022, le premier mètre cube de gaz est vendu. Mais très vite, le besoin en main-d’œuvre se fait sentir. C’est sans compter sur la cuma et son statut de groupement d’employeurs. Les agriculteurs décident alors d’embaucher deux personnes.
L’unité de méthanisation est financée par tous
« L’une est responsable de l’unité de méthanisation, l’autre du matériel de la cuma, explique son trésorier. L’objectif est que les deux structures puissent tourner toutes seules. Nous avons investi dans un atelier pour que cette personne puisse réviser et remiser le matériel. » Et s’ils ont encore du temps, ils sont capables d’aller prêter main-forte aux adhérents de la cuma pendant quelques heures pour grouper et améliorer le débit de certains chantiers.
Si l’unité tourne aussi bien, c’est grâce à l’esprit d’équipe qui caractérise ce groupe. Si certains y ont investi davantage de temps, tout le monde a mis de sa poche. « Sur un investissement de 7 M€, 22 % ont été subventionnés par le Feader et l’Ademe, calcule Julien Gauthey. Une levée de capital par les exploitations adhérentes et les adhérents eux-mêmes a permi d’obtenir environ 500 000 €. Avec cet apport et une cuma aux finances saines, la banque a prêté de l’argent sans problème. »
Un projet qui, sans la cuma, n’aurait pas vu le jour. « Avec la cuma, on apprend à se connaître, à savoir si on peut travailler ensemble », estime un adhérent. « Cette nouvelle activité a modernisé notre cuma, pérennisé nos exploitations, estime un autre. On espère qu’elles seront attrayantes pour les jeunes. »
Depuis quelques mois, la production de biométhane semble rodée. « Nous allons maintenant pouvoir nous concentrer sur les activités de nos exploitations », admet le président de l’unité. Mais on le ressent, cette activité a ouvert de nombreuses portes à cette cuma trentenaire. « Rien n’est figé, avec un tel outil, il y a plein d’idées qui en découlent et on s’autorise tout », aiment-ils rappeler. Même à rêver éveillés !
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