Une partie des 17 salariés a été priée de prendre des congés. Dans ce département rural, où la moitié des quelque 4.000 agriculteurs sont des éleveurs, selon Philippe Demiot, président de la FDSEA, la profession oscille entre incompréhension et craintes pour l’avenir de la filière.
« On n’est pas au manège enchanté », rappelle M. Demiot, qui qualifie de « discutable » la « méthode » de l’association L214. « Pour les gens qui tiennent les couteaux, ce n’est pas un choix de vie, et à la fin on a toujours une mise à mort », souligne le responsable agricole, qui redoute une nouvelle « baisse des cours » dans une filière « déjà déficitaire » après la fermeture de l’abattoir, où quelque 17.000 animaux sont équarris chaque année.
« On veut protéger les animaux et on détruit les hommes, les éleveurs qui veulent amener de bons produits aux clients sont pris au piège », poursuit M. Demiot.
Une équipe d’une dizaine de personnes dirigée par un fonctionnaire de la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP) était sur place lundi après-midi pour mener une enquête administrative, a constaté un journaliste de l’AFP.
Le président de la communauté de communes François Daugeron assure à l’AFP qu’une « responsable qualité avait été embauchée vendredi », jour de la diffusion de la vidéo, et que « d’importants travaux avaient été réalisés depuis un an ». « On met en place des protocoles mais les gars ne les respectent pas », regrette l’élu, ajoutant: « On a trois mois pour trouver un fonctionnement qui soit validé par les services de l’État ».
« Pas d’excuses »
Animaux suspendus par une patte, découpés alors qu’ils semblent encore conscients… La vidéo choc diffusée vendredi par L214 a provoqué la réaction rapide du ministère de l’Agriculture qui a ordonné le lendemain la fermeture provisoire de l’établissement public, géré par la communauté de communes du Pays de La Châtre-Sainte-Sévère.
Deux plaintes ont été déposées vendredi, l’une par l’abattoir pour intrusion et captation d’image d’un lieu privé. L’autre par L214 pour « maltraitance animale ».
Au rayon boucherie d’un supermarché voisin de l’abattoir, les clients restaient indifférents à la polémique. Un panonceau « Notre viande de boeuf est abattue chez Tricoche à Mérigny », a été apposé sur la vitrine réfrigérée, tandis que la langue de boeuf et le foie de veau sont en « offre spéciale ».
Éric Jouhanneau, éleveur bovin, se dit choqué par les images. « Ça refroidit. Il faut tuer les animaux dans les règles, je n’ai jamais vu ce genre de choses », assure l’éleveur pour qui l’abattoir n’aurait pas dû « être géré par une communauté de communes ».
A la ferme de l’Étang, située à proximité de l’abattoir, Maxime Pion, responsable local des Jeunes agriculteurs, est lui plutôt étonné: « S’il y avait des problèmes flagrants et réguliers, ça serait remonté », commente-t-il, précisant qu’un agent de la DDCSPP est « en permanence dans les locaux » de l’abattoir. « Ces images, on ne peut les cautionner », ajoute t-il, assurant qu’il n’y a « pas d’excuses ».
Philippe Foury, responsable de l’équipe dépêchée ce lundi dans l’abattoir, explique cependant à l’AFP que le bien-être animal ne relève pas de ses services « mais du propriétaire de l’animal ».
« L’originalité de cet abattoir du Boischaut, c’est qu’il travaille beaucoup avec les petits éleveurs qui font de la vente directe et emmènent une vache par mois à l’abattoir », explique de son côté Philippe Condy.
Pour cet ancien éleveur de brebis, le problème vient « davantage de la formation des personnels que de la structure en elle-même ». « Sur les 17 salariés, j’en connais plusieurs qui sont là depuis 15-20 ans et font bien leur métier, mais le reste du personnel est là un peu par dépit, et manque de qualification », assure-t-il.
L’abattoir du Boischaut à Lacs fournit 3.000 tonnes de viande par an.