Financement 2024 : les prévisions des banques sur la hausse des taux 

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Financement 2024 : les prévisions des banques sur la hausse des taux 

L'évolution des taux d'intérêt bancaires est incertaine dans un contexte où les achats de matériels tendent à se réduire en 2024.

Quelle analyse portent les banques sur les financements proposés pour l’achat de matériels ? Trois questions à Jean-Christophe Roubin, directeur de la branche agri-agro au Crédit Agricole, Sébastien Prin, directeur de la fédération du Crédit Mutuel agricole et rural, et Loïc Guitton, responsable du marché agriculture à la direction du développement Banque Populaire (groupe BCPE).

SOMMAIRE

Quelles sont vos prévisions sur l’évolution des taux d’intérêt dans les prochains mois ?

Jean-Christophe Roubin (JCR). Il est difficile de répondre à cette question compte tenu des possibilités d’évolution très rapide des taux. Dans un contexte de lutte contre l’inflation, on a observé, en 2022 et 2023, un renchérissement des taux de crédit. Depuis le début de l’année, nous assistons à une lente décroissance. Au 1er juillet, les taux Agilor s’élevaient à 4,10 % sur 5 ans, et à 4,20 % sur 7 ans. Contre 4,25 % et 4,35 % auparavant.

Jean-Christophe Roubin, Crédit Agricole.

Jean-Christophe Roubin, Crédit Agricole.

Sébastien Prin (SP). Le retour de l’inflation a impacté le coût des crédits, du fait de la forte augmentation des taux de refinancement de la Banque Centrale Européenne. Si le premier semestre 2024 a connu une diminution de ces taux, la crise politique que nous vivons actuellement en France change les perspectives.

Les incertitudes de ces dernières semaines exposent l’économie française, et donc le secteur bancaire, à diverses menaces : augmentation du coût du risque, dégradation de la note financière de la France ou nouvel accroissement des coûts de refinancement.

S’il est difficile de faire des projections dans ce contexte d’instabilité, je veux néanmoins rappeler la force de notre modèle mutualiste et la solidité financière de notre groupe, qui figure au niveau le plus élevé des banques françaises. Dans ce contexte très volatil, il peut parfois être utile de faire jouer la concurrence…

SebastienPrin

SebastienPrin, Crédit Mutuel.

Loïc Guitton (LG). Nous avons connu une hausse rapide des taux d’intérêt en 2022-2023, après une tendance baissière continue sur 10-15 ans. Depuis 2024, on observe à nouveau une baisse sensible des taux. Va-t-elle se poursuivre ? Je doute qu’il y ait de grandes évolutions de taux dans les mois à venir, malgré l’incertitude économique actuelle.

Aujourd’hui, nous en sommes à des taux de 4,20 % sur les prêts de 5 ans, 4,30 % sur les prêts de 6-7 ans et 4,50 % sur les prêts de 8, 9 et 10 ans.

Loïc Guitton, Banque Populaire.

Loïc Guitton, Banque Populaire.

De plus en plus d’acheteurs optent pour des formules de crédit rapide, proposées directement par les vendeurs. Ce type de crédit est-il généralisable ?

JCR. Nous fêtons en 2024 les 30 ans des prêts Agilor. La formule a fait ses preuves du point de vue de la rapidité et de l’efficacité. Avec ce système, nous garantissons en effet une réponse sous les 48 heures. Pour les clients du Crédit Agricole, nous avons mis en place un système de scoring, pour évaluer la catégorie de risque du client. Avec Agilor, toutes les démarches sont dématérialisées.

Nous avons développé cette formule chez l’ensemble des concessionnaires de matériels agricoles. Cela concerne principalement l’achat de matériels neufs. Actuellement, 9 dossiers de prêts sur 10 concernant l’achat de matériels agricoles font l’objet d’un Agilor. Je ne vois que des avantages dans ce dispositif. Le seul point d’attention est le décalage qui peut exister entre la date de signature du prêt et la date effective de livraison du matériel. Celle-ci étant parfois retardée de plusieurs semaines ou de plusieurs mois par rapport à la date initialement prévue.

SP. Actimat et Clé-Mat sont les formules de prêt amortissable proposées par les concessionnaires pour le groupe Crédit Mutuel, directement sur les lieux de vente du matériel agricole. Ces financements permettent l’achat de matériel neuf et d’occasion.

Le concessionnaire peut aussi proposer, avec ces deux marques, des achats sous forme de location financière selon la stratégie et l’utilisation du matériel par l’agriculteur ou la cuma. Le process est aujourd’hui totalement numérisé. Il présente donc l’avantage de la rapidité et de la simplicité.

LG. Avec ce système, la partie administrative est plus légère que pour un prêt classique. Nos équipes AGRILISMAT dédiées sont en mesure de garantir des délais de réponses rapides. Nous gardons bien sûr la main sur l’accord bancaire, tout en préservant la confidentialité des données financières de l’emprunteur vis-à-vis du vendeur de matériels. Toutefois, ce type de prêt est réservé au financement du matériel et ne devrait pas être étendu à d’autres cas.

Cependant, la dématérialisation des échanges, la signature électronique sécurisée permettront sans doute à l’avenir de proposer des solutions de crédits « pré-accordés » rendant ainsi l’agriculteur encore plus autonome.

Dans votre activité de prêteur, proposez-vous des conditions avantageuses d’accès au crédit pour les cuma ?

JCR. A l’échelon national, il n’y a pas de conditions particulières réservées aux cuma. En revanche, certaines caisses régionales de Crédit Agricole peuvent éventuellement nouer des accords particuliers avec les fédérations de cuma.

Par ailleurs, nous sommes convaincus de l’intérêt des investissements en commun. De même que nous croyons au développement du leasing, ainsi qu’à l’achat de matériels de seconde main.

SP. Oui, en règle générale, en utilisant les formules de prêts aux concessionnaires précédemment citées. Cela traduit bien l’histoire commune entre notre groupe bancaire et le réseau des cuma, autour des valeurs partagées de solidarité, de proximité et d’innovation.

LG. Les conditions particulières qui peuvent être proposées, telles que la prise en charge des frais de dossier de prêt ou la réduction des frais de tenue de compte, sont décidées en région. La Banque Populaire est soucieuse d’accompagner les agriculteurs dans la gestion prévisionnelle de leurs investissements en privilégiant des formules telles que le crédit-bail, qui donnent de la lisibilité à l’agriculteur sur les coûts prévisionnels d’utilisation de son matériel.

En effet, on connaît par avance les loyers et le coût de l’option d’achat en fin de période de location. Désormais, de nouveaux types de contrats présentent des options permettant de cesser le crédit-bail dès 2 ou 3 ans après l’achat du matériel. Cela peut être pratique pour un agriculteur qui souhaiterait disposer d’un nouveau matériel, par exemple en agriculture de conservation des sols, mais dont il n’est pas sûr qu’il lui convienne à moyen terme.

Enfin, pour faciliter la transition agro-écologique et la mutualisation des matériels via les cuma, les Banques Populaires lanceront prochainement le ‘prêt à impact’. L’objectif est de favoriser des achats plus responsables avec ce type de prêts déjà proposés dans d’autres secteurs auprès de Pme ou Eti.

L’agriculteur s’engagera sur trois indicateurs qu’il pourra choisir parmi une liste comme le niveau d’activité (chiffre d’affaires) développée au sein de la (ou des) cuma auxquelles l’exploitation adhère, le niveau de consommation de carburant et enfin la plantation de haies. Ensuite, s’il atteint les objectifs qu’il s’est fixé, il pourra bénéficier d’un remboursement d’intérêt pouvant aller jusqu’à 10%.

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