Depuis le 25 février 2022, une partie de l’Ukraine a été détruite dans des bombardements emportant des dizaines de milliers de civils. Dès les premiers missiles, certains Ukrainiens ont choisi de se réfugier dans d’autres pays. On estime qu’ils sont plus de 3 millions, expatriés principalement en Europe. Par ailleurs, de nombreuses maisons sont détruites ainsi que des infrastructures comme des routes, hôpitaux, lignes de transmission électriques et hydrauliques notamment. Sans oublier les conséquences agricoles de la guerre en Ukraine.
Ralentissement de la production agricole
« Si dans certaines régions, les troupes russes se sont retirées, il s’est avéré que de nombreuses entreprises ont été pillées, raconte Iurri Mykhailov, journaliste ukrainien. De nombreuses entreprises sont fermées ou ont des problèmes pour fonctionner normalement faute d’électricité, d’approvisionnement ou de transports de marchandises trop onéreux. »
Ainsi, la banque mondiale estime qu’il faudra plus de 500 à 600 milliards d’euros pour reconstruire le pays.
Du côté de l’agriculture, l’invasion des troupes russes a impacté les marchés agricoles de 50 milliards d’euros.
« Ce montant traduit une baisse du revenu des agriculteurs avec un ralentissement de leur production et des prix plus bas, explique l’Ukrainien. D’autre part, les coûts des intrants sont en hausse. »
Il estime également que 6 millions de tonnes de grains ont été volés, soit l’équivalent d’un milliard d’euros. Par ailleurs, 20 % des troupeaux d’animaux sont concentrés sur les territoires en guerre.
Parmi les conséquences agricoles de la guerre en Ukraine: les élevages de volaille touchés
« La production de volaille notamment a été revue à la baisse pour tenter de réduire les bandes d’animaux qui ne se commercialisaient pas, explique Iurri Mykhailov. Résultat, les prix ont bondi de 20 à 30 %. »
Les poulaillers situés à l’est de l’Ukraine sont les plus décimés. Faute d’énergie pour les nourrir, beaucoup d’animaux sont morts. « Depuis dix mois, le nombre de poulets élevés s’est réduit de 14 %, lance l’Ukrainien. La volaille de chair a diminué de 74 000 tonnes. »
Concernant les céréales, le ministère de l’agriculture ukrainien, estime que la récolte de 2022 avoisine les 67 millions de tonnes de céréales et oléagineux. « Encore un tiers des surfaces de maïs ne sont toujours pas récoltées, reconnaît le journaliste. La difficulté à sécher les grains est l’une des principales raisons. »
En blé d’hiver, on estime qu’il manque 30 % des surfaces ukrainiennes emblavées habituellement. La récolte risque d’être moins bonne, sans compter les territoires minés et l’accès aux intrants limité.
Les Russes entravent le trafic des bateaux
Toutefois, les exportations semblent se poursuivre. « En 2022, nous avons exporté 52 Mt de produits agricoles, compte Iurri Mykhailov. C’est 13,7 % en valeur économique, de moins que l’année précédente. Du 24 février au 1er août, les exportations n’étaient possibles que par camions, péniches ou trains. »
Mais l’Ukraine est aussi un gros exportateur de viande de volaille. Les ventes ont diminué de 30 % pour l’Europe. Pour les œufs, la tendance est encore plus accentuée avec une baisse 40 % des exportations.
Toutefois, les trafics se font au ralenti. À cause notamment des bombardements et des coupures d’électricité fréquentes sur le port d’Odessa. Ainsi que des Russes qui entravent le trafic des bateaux en retardant les inspections, augmentant les délais pour obtenir les agréments, etc.
Si on ne peut pas prévoir l’année 2023, il faut tout de même rappeler que « l’avenir incertain domine les pensées des Ukrainiens. La guerre continue, ne cesse de répéter le journaliste. Les hommes proposes, Dieu dispose. »
Des grains ukrainiens à exporter
L’Ukraine, avant la guerre, représentait plus de 28 % du marché de blé mondial, 23 % pour le colza et 19 % pour le maïs. En 2022, il a manqué plus de 5 Mt pour atteindre les objectifs d’exportation de blé prévus et 13,5 Mt pour le maïs.
« L’union européenne, quant à elle, a pour habitude de commencer à importer des grains en février, explique Joris Van Ven, expert du marché des grains dans un cabinet de courtage belge.
La guerre a donc réduit les échanges au moment où les exportations sont les plus soutenues en mer Noire. Le manque de marchandise a eu un effet de panique sur les marchés et a induit de nombreux problèmes d’approvisionnement. »
Autres conséquences agricoles de la guerre en Ukraine : des productions revues à la baisse et des exportations au ralenti
En août, trois ports ukrainiens s’ouvrent pour laisser s’échapper de la marchandise. Cela fait suite à un accord trouvé. Un corridor s’est mis en place.
« Cependant, les exportations se font à un rythme beaucoup plus lent qu’à l’habitude, a constaté l’expert. Il y a de nombreuses inspections et les coupures d’électricité ou pénuries d’énergie bloquent les navires pendant plusieurs jours parfois. »
D’autant que beaucoup de grains vont approvisionner le marché européen, faute de marchandise.
Par ailleurs, la production de grains en Ukraine a déjà été revue à la baisse de 31 Mt entre 2021 et 2022. De moitié pour le maïs et d’un tiers pour le blé. En 2023, les experts imaginent une réduction de la production de 16 à 18 Mt. Soit plus de la moitié en temps habituels.
« La zone sous conflit est une grosse zone de production de blé. Les agriculteurs rencontrent de nombreux problèmes pour sécher leurs grains, relate Joris Van Ven.
La guerre nous a montré que le monde a besoin des exportations de la mer Noire et que les surfaces non emblavées, le coût de l’énergie et des intrants, menacent la chaine alimentaire mondiale. Enfin, il faut le rappeler, le corridor est primordial pour approvisionner les pays de l’Union Européenne. »
La filière laitière touchée également
La guerre qui se cantonne dans l’Est de l’Ukraine touche plus d’une centaines d’exploitations laitières.
« On estime que le cheptel s’est amoindri de 9,3 % de vaches depuis dix mois, annonce Hanna Lavrenivk, responsable de l’association Milk Producers en Ukraine. D’ici la fin 2022, nous imaginons que le cheptel ukrainien aura diminué de 16 %, provoquant une perte de 16 % des volumes de lait destinés à la transformation. »
Sans compter les coûts de production qui sont devenus exorbitants. Par ailleurs, les ports, lieux d’exportation de la ressource laitière sont toujours bloqués.
« Nous avons des besoins urgents en matière de génératrices, de démineurs et de bras pour réparer les équipements, lance Hanna Lavrenivk. Nous attendons de la nourriture pour les animaux, des médicaments et produits d’hygiène, ainsi que des vétérinaires. »
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