Pour la gestion de la main d’œuvre en cuma, «nous serons obligés de passer par l’emploi. Alors autant prendre les devants plutôt que de le subir», remarque Jérôme Arnaud, président de la fdcuma, membre de la commission emploi des cuma. Dans le Puy-de-Dôme comme ailleurs, l’emploi en cuma répond à des besoins qui ne sont pas toujours les mêmes. Tout dépend du territoire et de l’activité de la cuma.
À Manzat par exemple, la cuma de Sioule et Morge fait travailler Maxime Queyrut depuis trois ans et Maxime Aubignat depuis sept ans. La cuma propose essentiellement de l’ensilage et de la fauche. «Pour la fauche, les adhérents se débrouillent bien seuls, en revanche, pour l’ensilage ce sont les chauffeurs qui conduisent le matériel», précise Régis Chassagnol, le président.
Gestion de la main d’œuvre en cuma: s’appuyer sur plusieurs salariés
«L’ensilage, c’est une période de tension. Lorsqu’il y a des tensions, c’est moi qui les gère, mais quand ça se passe bien les adhérents appellent le chauffeur directement. J’essaie de convoquer une AG juste avant les ensilages, et j’organise les chantiers. Les adhérents m’appellent pour l’ordre de passage. Nous avons un rayon d’action de 20km autour de Combronde.»
Deux machines identiques tournent: celle qui a 10ans sera renouvelée au mois d’août et l’autre, de 2015 attaque sa sixième campagne. «Nous louons un hangar, comme ça, le chauffeur fait la préparation et l’entretien du matériel avec moi. La mise en route de la machine se fait sur place. Les contrats de travail durent un peu plus longtemps que l’ensilage. Les chauffeurs entretiennent, lavent et remisent aussi les machines.» Pour l’organisation des chantiers et la gestion du matériel, le président reconnaît l’intérêt de s’appuyer sur deux salariés, sans compter le gain de temps pour ses adhérents.
Salariés saisonniers ou à l’année
Une aide dont ne pourraient plus se passer les adhérents de la cuma de Tortebesse, eux non plus. Ce printemps, Jérôme Arnaud, le président, organise le passage de relais entre deux salariés. Il projette déjà de faire travailler une personne supplémentaire dans quelques mois. «Romain Souchal est chez nous depuis dix ans et Hugo Afonso est là depuis le 1er janvier. Romain s’en va, donc on a pris Hugo pour qu’il puisse le remplacer. Dans la cuma nous sommes huit adhérents à utiliser les services de salariés à plein temps. Ils travaillent quarante heures par semaine.»
Avant Romain, la cuma a longtemps fait travailler des emplois saisonniers notamment pour la conduite des ensileuses. Il y a dix ans, Romain Souchal arrive, en apprentissage. Il est embauché en CDI l’année suivante. «À l’époque nous nous sommes bougés pour le garder», se souvient le président. Aujourd’hui, Jérôme Arnaud réfléchit aussi à mettre en place dans la cuma un autre emploi à plein temps pour l’entretien du matériel et sa bonne utilisation avec une partie conduite.
Il faut accepter de déléguer
«L’objectif c’est de recruter un deuxième salarié permanent l’an prochain. Nous nous équipons en semis direct. Il y a de la demande là-dessus mais les adhérents ne veulent pas trop se former à utiliser cet outil. Ce serait la tâche d’un chauffeur, ainsi que la conduite d’autres outils de la cuma pour lesquels il faut avoir un peu de bouteille.»
Jérôme Arnaud analyse avec réalisme la situation de l’emploi dans sa cuma. «Pour embaucher un deuxième salarié, il faut trouver des heures et lui proposer quelque chose de valeur. Il faut offrir un plein-temps, pas un temps partiel. Mais pour cela, il faut que le prix du lait augmente, sinon nous ne nous en sortirons pas. Sans compter que nous n’avons pas d’aide pour embaucher. L’autre difficulté, reconnaît le président, c’est que du côté des adhérents, il faut accepter de déléguer.»
Gestion de la main d’œuvre en cuma: proposer assez d’heures pour fidéliser
Embaucher à plein temps, c’est aussi un des projets de la cuma des Hautes-Combrailles. Aujourd’hui, elle fait travailler deux «chauffeurs saisonniers, essentiellement sur les périodes d’ensilage», détaille Pierre-Édouard Barret, son président. «Après il y en a un qui vient faire un peu plus l’entretien des machines. Et puis il y a toujours un troisième chauffeur de secours qui conduit quand c’est nécessaire, moi en l’occurrence.» Pendant de longues années, son père se chargeait de l’entretien du matériel, aujourd’hui, Pierre-Édouard Barret a repris le flambeau, «mais c’est beaucoup de temps passé sur le matériel de la cuma et pas sur son exploitation», constate Florian Giraudom.
La cuma envisage d’embaucher un chauffeur à l’année, «qui soit mécano et chauffeur de tracteur», précise Florian Giraudom, adhérent de la cuma. «Nous avons tout d’abord le projet de créer un vrai atelier pour l’entretien du matériel», explique Pierre-Édouard Barret. C’est le premier pas avant d’embaucher un salarié à l’année à plein temps. Cela permettrait de faire baisser les charges d’entretien du matériel. «Le but, ce serait que les adhérents de la cuma amènent leur matériel à réparer ou à entretenir. Puisque le coût de l’heure de mécanique en concession est de plus en plus élevé. Et sur la période de fauche, il conduirait le tracteur.» Le projet phare de la cuma cette année, «c’est la construction d’un atelier pour travailler dans de bonnes conditions, faire des bureaux et offrir les conditions nécessaires pour accueillir un salarié.»
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Assurer un plein-temps
«Benjamin Domas travaille à plein temps pour la cuma depuis le 1er avril 2011», se souvient Pierre Viallard, trésorier de la cuma des Châteaux à Condat-lès-Montboissier (63490). «Au départ nous passions par la structure départementale Agri Emploi. Mais il est devenu salarié de la cuma le 1er avril 2018, grâce à la possibilité pour les cuma de devenir groupement d’employeurs.»
Embauché à plein temps avec un système de mise à disposition, le salarié intervient chez cinq adhérents et le reste du temps il travaille pour la cuma en conduite d’automoteurs et sur un rôle de mécanicien d’entretien. «Il est là depuis dix ans. Si on voulait le garder, il fallait lui assurer un plein-temps.» Le travail s’est organisé sans heurt. «C’est moi qui fais le planning annuel. Dans son planning la récolte est prioritaire sur le travail chez les adhérents. Lorsqu’il a fait beaucoup d’heures, je dois insister pour qu’il lève le pied parce qu’il faut vraiment qu’on respecte la législation.»
Toutes les cuma n’ont pas le même besoin et n’attendent pas la même chose de leurs salariés. Salarier quelqu’un demande du temps et des compétences. Le choix de passer en direct ou de s’appuyer sur une structure comme Agri Emploi doit donner du confort et de la tranquillité aux conseils d’administration et aux adhérents.
Gestion de la main d’œuvre en cuma: déléguer…
À Manzat, Maxime Queyrut et Maxime Aubignat sont saisonniers et embauchés par Agri Emploi 63. «Nous passons par ce groupement depuis sa création en 2006. Ça coûte un peu plus que de faire soi-même mais on gagne en tranquillité. Ils s’occupent des contrats. Ils sont l’employeur des chauffeurs et moi je suis en contrat avec Agri Emploi. Chaque mois travaillé je remplis des feuilles d’heures», précise Régis Chassagnol, le président de la cuma.
Les deux chauffeurs travaillent pour d’autres entrepreneurs de battage. «J’aimerais garder mes deux chauffeurs mais il faut bien comprendre que c’est un métier difficile, l’ensilage. Ça va les occuper deux mois et demi à peine, guère plus de trois cents heures et ça sur les deux saisons herbe et maïs. Cela reste du travail saisonnier et ce n’est pas un mois bloqué. Les jours de travail sont déterminés par la météo.»
…ou assumer soi-même l’administratif
Pour la cuma de Sioule et Morge, passer par Agri Emploi reste la solution satisfaisante. Ce qui n’empêche pas Régis Chassagnol de se projeter dans l’avenir. «Occuper nos deux salariés plus longtemps, ce sont des projets qui sont à l’étude mais qui n’ont pas encore été concrétisés. D’autant que nous pourrions développer cela, surtout avec les nouveaux statuts des cuma, qui donnent la possibilité d’être groupement d’employeurs. Ce serait l’idéal parce que si vous ne l’employez pas à l’année vous pouvez le mettre au service de vos adhérents.» Les deux saisonniers apprécieraient de travailler régulièrement dans les mêmes fermes plutôt que de changer en fonction des contrats.
Faute d’avoir trouvé un adhérent qui soit d’accord pour se charger de tout l’administratif, bien qu’elle fasse travailler ses salariés sur du long terme et à plein temps, la cuma de Tortebesse n’a pas choisi d’être officiellement l’employeur des jeunes. «Nous nous sommes posé la question de devenir employeur quand on a embauché Hugo Afonso au mois de janvier. Nous pouvions embaucher en direct. En revanche, je ne souhaitais pas m’occuper des papiers. Comme personne n’a voulu s’occuper de toute la partie gestion administrative, nous passons par Agri Emploi», explique son président Jérôme Arnaud.
Bien préparer la transition
Actuellement en contrat avec Agri Emploi pour les saisonniers, la cuma des Hautes-Combrailles a déjà modifié ses statuts pour pouvoir devenir employeur direct lorsqu’elle embauchera un plein-temps. «Comme ça, si au début on n’a pas assez de travail à l’atelier, il y a la possibilité d’envoyer le salarié travailler chez un adhérent», précise Pierre-Édouard Barret.
À la cuma des Châteaux, Benjamin Domas a été recruté pour un besoin de chauffeur d’automoteur mais pour arriver à l’embaucher, cinq exploitations se sont engagées sur un nombre d’heures pour arriver à un plein-temps. «Il ne venait que si c’était un plein-temps, explique Pierre Viallard. Il est là depuis dix ans et restera encore longtemps.»
La cuma a quitté Agri Emploi pour passer en direct. «Ça coûte moins cher», précise Pierre Viallard. «Ça n’a pas coûté moins cher directement aux adhérents puisque nous avons décidé de reverser la différence à notre salarié. Ça a été conclu comme ça au départ.» Le trésorier de l’association a repris la partie administrative, comme le planning et le bulletin de salaire est édité par le centre de gestion. «Nous sommes un peu plus maîtres du truc, apprécie Pierre Viallard, mais je passe quand même un peu de temps sur l’administratif.»
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Apprentissage et groupement d’employeurs, c’est possible.
Deux adresses ressources dans le Puy-de-Dôme :
Agri Emploi 63 pour les salariés partagés – Les cuma ont des besoins en termes de main-d’œuvre parfois insuffisants pour justifier un plein-temps. Grâce à l’emploi partagé, elles peuvent obtenir des compétences et pallier les difficultés liées au recrutement et à l’intégration. Le salarié travaille pour plusieurs employeurs en ayant un seul contrat de travail avec un tiers: le groupement d’employeurs (GE). Agri Emploi 63 se charge de toutes les obligations qui incombent à l’employeur: contrats, fiches de paie, déclarations sociales et paiement des cotisations patronales. Elle peut aussi se charger du recrutement.
AGRI EMPLOI 63 – 11 allée Pierre de Fermat – 63170 Aubière. mail : [email protected]
Le Groupement d’employeurs du Petit Chignat – Plus de 20ans qu’à Cunlhat, le groupement d’employeurs du Petit Chignat assure un service apprécié aux cuma et aux adhérents. «Avoir un atelier permettant de réaliser les opérations d’entretien et les réparations est important. Plus personne ne voudrait s’en passer», confie Cyril Borel, administrateur du GE. Le Petit Chignat, c’est une partie atelier avec 1,5 temps plein. «Un service de proximité pour les cuma adhérentes.» Depuis 2013, un poste de chauffeur a aussi été créé. En plus de la proximité, les tarifs restent attractifs : 33€/h pour la mécanique (19,50€/h pour la main-d’œuvre et 13,50€/h pour l’atelier, les outils et les consommables) et 19,50€/h pour la conduite.