Une exploitation, une ferme, c’est d’abord un paysan avec ses activités ; c’est aussi une entreprise, une entité économique et financière. Pour exercer son métier, le paysan commence par acheter son outil de travail, payé le plus souvent avec de l’argent emprunté. Ainsi, il devient un travailleur-entrepreneur contraint de trouver du revenu pour vivre et capitaliser en remboursant ses emprunts. Rappel : l’argent emprunté n’est pas un produit et l’argent rendu n’est pas une charge. Une charge est une consommation, pas forcément une dépense. Ex: une cuve de fuel consommée, même si elle n’est pas encore payée, ou la consommation d’équipements (amortissements).
Le «disponible» de l’exploitation
Le « disponible » est un montant d’euros en banque ou en caisse. Il représente la situation de la trésorerie à un moment donné. Celle-ci dépend de trois facteurs: du financement de l’outil de production et de celui du cycle de production, puis du revenu ; d’où ces trois « impératifs » :
1/ L’outil de production (terres, équipements, cheptel…) est à financer avec des capitaux stables et permanents (fonds propres, subventions d’équipements et emprunts à long ou moyen terme). Un excédent de ces capitaux est nécessaire pour constituer un indispensable fonds de roulement.
2/ Une culture, un élevage… génère un besoin de financement (semence, aliments…) pour la durée du cycle de production. Ce besoin est à couvrir par le fonds de roulement et, s’il est insuffisant, par du crédit bancaire court terme ou des différés de paiements jusqu’à la vente du produit.
3/ Les prélèvements privés et la capitalisation (remboursement des emprunts terre et cheptel, autofinancement…) sont à financer par un revenu au moins équivalent, au fur et à mesure des ventes et des aides encaissées.
Le disponible au jour le jour résulte de l’application concomitante de ces «impératifs».
Le «revenu» de l’exploitation
Le revenu n’est pas un solde de recettes moins dépenses, mais celui du compte de résultat. Celui-ci regroupe les produits et charges pour une période de douze mois: l’exercice comptable. Par produits, il faut entendre «production des activités stockées, vendues et encaissées ou non, plus les aides». Et par charges, «consommation de biens et de services, plus d’autres frais, payés ou non». L’objectif est de rassembler les produits et charges correspondant au cycle de production de l’exercice concerné. Ex: dans un exercice comptable 2017, un blé récolté et vendu mais non encaissé est quand même compté en produits et sa semence, mise en terre et payée en 2016, est aussi comptée en charges. Sinon, en partant des paiements et encaissements 2017, il manquerait des données pour évaluer l’activité blé et le revenu en serait faux. A elles seules, les recettes et dépenses ne reflètent donc pas forcément la situation économique de l’exercice et peuvent même induire en erreur. Ex: un paysan en difficulté, avec plus de charges que de produits, prélève quand même sur ses ventes pour vivre. En ne raisonnant que trésorerie, ces prélèvements deviendraient le revenu de l’exploitation, mais un revenu fictif car obtenu en contrepartie d’impayés…
Deux réalités
Le disponible privé du paysan, ce sont ses prélèvements, qui ne sont pas son revenu social, fiscal et juridique. Le disponible de l’exploitation est le solde de banque au quotidien et aussi un élément de la situation financière représentée par le bilan. Son revenu est un indicateur économique de la situation décrite par le compte de résultat. « Revenu » et « Disponible » recouvrent donc deux réalités à ne pas confondre.
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Vous pouvez aussi relire, sur ce thème, le dossier intitulé » Les clés de la rentabilité » paru dans le numéro Entraid de juillet-août 2017. Pour vous procurez ce numéro, si vous n’êtes pas abonné, connectez-vous sur la boutique Entraid.