Il suffit de suspendre un thermomètre sur un fil, dans une vigne languedocienne, pour comprendre l’ampleur du problème du gel: « Sur une semaine, nous avons relevé des extrêmes de -8°C à 32°C« , note Raymond Llorens, président de la fédération des cuma Gard-Hérault.
« Les sols continuent à se réchauffer, entraînant des montées de sève, tandis que les parties végétatives subissent le gel. »
Le gel a toujours existé à ces périodes, souligne-t-il. Mais cette année, l’intensité et la durée de ces phases de températures négatives dépassent ce que peuvent habituellement encaisser les vignes. Lors de la phase la plus aigüe, « à minuit déjà, les températures étaient négatives, et nous en sommes sortis à 8h du matin« .
Semaines d’incertitude
L’estimation prendra encore trois bonnes semaines, selon Raymond Llorens, pour plusieurs raisons. En premier lieu parce que l’épisode se termine à peine. La nuit du 19 avril, il gelait encore dans le secteur. Ensuite parce que les experts devront regarder comment les plantes reprennent. « On ne saura s’il y a fructification qu’après la floraison« , explique le président de la fédération.
Et enfin parce que certains dégâts, en raison de la sévérité de l’épisode, pourraient aller au-delà de la perte de récolte. « Montées de sève et températures négatives peuvent entraîner l’éclatement des canaux de sève« . En clair, la mort de certains pieds, et donc, des pertes de fonds.
Les solutions collectives restent difficiles à envisager. « Les tours antigel sont actives sur 8 à 10ha, mais nos parcelles ne sont pas assez regroupées« , regrette-t-il. « Certains ont allumé des ballots de paille; mais l’intensité du gel (jusqu’à -9°C, ndlr) était telle que cela n’a pas suffit« .
À lire également: Les tours anti gel à rude épreuve
100% des cuma impactées par le gel
Raymond Llorens estime qu’environ 15 à 16% des viticulteurs de ses départements sont assurés pour ce type d’épisode, les contrats d’assurance n’étant pas obligatoires.
Le président le fdcuma 30-34 estime que « quasiment 100% des 200 cuma du Gard et de l’Hérault seront impactées« , car les adhérents et responsables doivent continuer à faire face aux charges fixes, qui représentent selon lui 70 à 80% de la charge totale, et certains nombres n’auront pas de revenu, malgré les plans d’aide qui sont en cours de construction.
Il craint également pour la dynamique de reprise et d’installation: « Ceux qui étaient proches de la retraite pourraient prendre des décisions sur un coup de tête, se dire qu’ils ne peuvent plus continuer dans ces conditions. Ceux qui envisageaient de reprendre vont peut-être repousser leur projet et réfléchir. Les conséquences vont se mesurer à court terme mais aussi sur le temps long. »