Chaque nuit, 12.000 personnes, grossistes, courtiers, producteurs, transporteurs, accessoiristes, restaurateurs vont travailler dans le marché d’intérêt national qui s’étend sur 234 hectares à 7 kilomètres des portes de Paris et revendique d’être le plus grand marché de produit frais au monde.
Antoine d’Agostino, 83 ans, qui a commencé à travailler aux Halles centrales de Paris à 14 ans et est aujourd’hui patron de la Cave de Rungis où il vend du vin, champagnes et spiritueux en gros, n’éprouve pas une grande nostalgie pour l’ancien marché qui a déménagé il y a 50 ans.
« Je regrette d’avoir 50 ans de plus, mais pas la façon de travailler. Aujourd’hui la façon de travailler ici c’est facile, même si ça reste compliqué. Tout est mécanisé, enfin beaucoup de choses, en grande partie », raconte-t-il à l’AFP.
« Les gens ne portent plus de viande, tout est mécanisé, il y a le respect de la chaîne du froid, la traçabilité, pour donner toutes les garanties au consommateur… », renchérit Guy Eschalier, 96 ans, ancien des abattoirs de la Villette qui étaient établis dans le nord-est de la capitale.
Il regrette cependant l’ambiance de cette époque: « il y avait les bistrots en face, les vendeurs allaient avec leurs clients boire un café, manger un morceau, les rapports humains étaient différents de ce qu’ils sont maintenant », assure-t-il.
Pas les mêmes métiers qu’autrefois
« Si on regarde, en 50 ans, évidemment, le nombre de salariés a un peu diminué, mais pas beaucoup, on est plutôt en pénurie d’emplois, parce qu’évidemment, aujourd’hui ce ne sont pas les mêmes métiers qu’autrefois », explique à l’AFP Stéphane Layani, le président du marché de Rungis.
« Ces 20 dernières années, on s’est positionné dans la qualité, le commerce de proximité, et ça a été notre chance puisqu’on augmente énormément notre chiffre d’affaires, on est à 9,4 milliards pour la première fois cette année », poursuit-il.
L’avènement de la grande distribution dans les années 70, n’a pas représenté une « concurrence frontale » pour le site, explique la société gestionnaire de Rungis, la Semmaris, parce que Rungis s’adresse « aux commerces de détail dans Paris ».
Au contraire, le marché s’est adapté aux tendances de la consommation et à la demande des restaurateurs et des épiceries fines. Par exemple, il y a un « boom des poissons entiers aujourd’hui, du bio (+50% en 5 ans sur le Marché), et des produits exotiques comme l’avocat », selon la Semmaris.
Rungis a d’ailleurs construit en 2015 une halle bio. Et comme la numérisation n’épargne personne, même les marchés de gros, Rungis a développé sa propre plateforme de vente en ligne afin de proposer des solutions d’achats en gros à ses clients professionnels de l’agroalimentaire et des métiers de bouche.