J’ai fait une demande de rencontre avec le Premier ministre car, vu l’étendue des pertes et la complexité des dossiers, il doit faire appel au ministre de l’Agriculture mais aussi à Bercy. C’est du ressort du Premier ministre de pouvoir arbitrer un certain nombre de demandes », a dit M. Beulin au Space, le salon international de l’élevage qui se tient à Rennes depuis mardi et jusqu’à vendredi. « Nous demandons de partager avec les pouvoirs publics le diagnostic que nous faisons sur les pertes liées au climat, aux marchés, ainsi qu’aux crises sanitaires qui génèrent des niveaux de perte jamais vues sans doute depuis l’après-guerre », a indiqué M. Beulin qui estime ces pertes entre 4 et 5 milliards d’euros sans compter l’épisode de sécheresse de cet été. La FNSEA réclame « des annonces très rapides de la part du gouvernement sur un plan de refinancement de l’agriculture française », ainsi que sur les exonérations de charges. « Il faut passer par les banques qui sont les interlocuteurs des agriculteurs, mais il faut aussi que le gouvernement nous garantisse la mise sur pied d’une sorte de fonds de réassurance pour délester une partie du risque des banques vers l’Etat pour avoir des taux et des durées d’emprunt compatibles avec la rentabilité de l’agriculteur », explique-t-il. Par ailleurs, le patron du premier syndicat agricole français rappelle que l’agriculture familiale connaît de « très, très grandes difficultés économiques. On a quasiment tous les jours un drame humain dont on parle très peu ».
« Il y a malheureusement un certain nombre d’exploitations, de familles d’agriculteurs qui ne pourront pas passer ce cap. C’est notre devoir de les accompagner avec des dispositifs et des moyens pour leur permettre d’obtenir, ou bien une retraite anticipée, ou d’avoir la possibilité de se reconvertir » et la FNSEA « veut se battre pour obtenir les moyens pour accompagner ces agriculteurs, car lorsqu’un agriculteur est en difficulté, tout y passe, sa vie personnelle, jusqu’à sa maison », selon M. Beulin. « Aujourd’hui, quand une usine est menacée de fermeture, ça mobilise tout le monde y compris le chef de l’Etat. Quand un agriculteur, quand 100 agriculteurs, quand 1.000 agriculteurs sont dans cette situation, ça n’émeut personne. Il est temps qu’on prenne la situation humaine et sociale de l’agriculture en compte », clame-t-il.
La Confédération paysanne, syndicat qui regroupe 20% des professionnels du secteur, fait le même constat de détresse morale et économique des agriculteurs, mais prône pour sa part de favoriser l’accès à la prime d’activité pour un an sur la base du revenu familial réellement disponible, de distribuer des aides à la trésorerie de 5.000 à 10.000 euros par ferme et d’autoriser un moratoire sur les échéanciers de paiement à tous les créanciers. Ces mesures économiques doivent être financées, selon ce syndicat, par une contribution de l’Etat et « des responsables de la crise (agroalimentaire, grande distribution, assurances, banques, coopératives…) – via la loi de Finances à l’Assemblée nationale fin septembre ». La contribution devrait également provenir des collectivités territoriales et de la réserve de crise européenne. Le syndicat demande également l’accès à un service de remplacement gratuit pour éviter les situations d’épuisement professionnel ou les burn-out car beaucoup de paysans « sont noyés dans le travail », a expliqué le porte-parole de la Confédération Laurent Pinatel.
Rennes, 13 sept 2016 (AFP)