Un groupe d’experts de la FNAMS a travaillé à un scénario d’évolution des méthodes de désherbage. Jean-Albert Fougereux, directeur technique et chef de service céréales et protéagineux, l’a présenté à la journée Désherb’Expo, le 1er juin. Le désherbage chimique n’a pas le vent en poupe, et il n’y a pas que le glyphosate qui soit visé. Premier point relevé par la Fnams : le nombre de molécules autorisées en France a baissé de 26% en 10 ans, passant en dessous de 100. Les nouveautés se font attendre, et aucun nouveau site d’action n’a été découvert depuis les années 80. Par contre, le nombre d’adventices résistantes augmente continuellement. Face à cette situation, les agriculteurs et les chercheurs envisagent d’autres solutions.
Bon sens et agronomie
La première consiste à « déployer les leviers de l’agronomie » : diversifier les cultures et les périodes de semis dans la rotation, travailler le sol (labour, déchaumage, faux semis), décaler les dates de semis. Certains outils sont plus apparus plus récemment : semis direct, cultures associées, couverts d’inter-culture. Mais la Fnams rappelle aussi ses « règles de bon sens » : utiliser des semences propres ou certifiées, nettoyer les matériels (travail du sol, moissonneuse…), éviter la montée à graine des adventices aux abords des parcelles, arracher ou biner manuellement les plantes adventices constituant des foyers potentiellement problématiques (notamment vivaces).
Seconde arme contre les adventices : le désherbage mécanique. On connait depuis longtemps la bonne vieille bineuse mais d’autres lui font suite, et notamment ce que la Fnams appelle des « matériels intelligents ». Par exemple les systèmes de guidage par caméra, ou les robots. Alors qu’il représente aujourd’hui 10% des pratiques, le désherbage mécanique pourrait monter à 30% en 2030, dans le scénario imaginé par les agronomes de la Fnams. Egalement en hausse : les pratiques agronomiques, qui passeraient de 20 à 35%. Les moyens chimiques tomberaient par contre de 70% à 25%.
De nouveaux développements
C’est là qu’apparaît un nouveau concept, pour obtenir un total de 100% : les « nouvelles technologies ». Un vocable qui rassemble plusieurs éléments : la génétique, le biocontrôle, les nouveaux équipements. La génétique peut permettre d’obtenir des plantes à plus fort pouvoir couvrant, une qualité intéressante par exemple en céréales (mais moins en betteraves…). La technique du gène dirigé, afin de rendre stériles les adventices, a aussi été envisagée. Elle soulève toutefois « des questions d’éthique et réglementaires », remarque la Fnams. Deux produits de biocontrôle, des herbicides non sélectifs, sont autorisés en France : l’acide acétique et l’acide pélargonique. Dans le monde, ce sont 13 substances de cette famille qui sont commercialisées, dont 12 extraites de micro-organismes. La Fnams cite deux exemples, l’un contre la cuscute et l’autre contre les pissenlits dans le gazon, mais observe que ce sont « des solutions peu utilisées, d’une efficacité au champ aléatoire et avec un spectre d’action très étroit ». Plus prometteurs : les micro ARN. Ces extraits naturels de peptides sont notamment étudiés en France par une startup, Micropep. Ils auraient des applications « envisageables d’ici 8-10 ans… ».
Laser ou électricité
Deux méthodes ni mécaniques, ni biologiques, ni chimiques, de destruction des adventices arrivent également. Le laser, appliqué sur le méristème (les quelques cellules où a lieu la croissante d’une plante), est à l’étude sur carotte, chez SPL (Autriche). L’électricité, circulant entre l’adventice et le sol, est pour sa part mis en œuvre par Zasso sur son Electroherb. La Fnams relève enfin que les technologies numériques vont apporter leur appui à différentes méthodes de désherbage pour gagner en précision. Citons l’analyse d’images, pour l’assistance au guidage comme la détection des adventices, les algorithmes, pour la commande d’organes effecteurs, et la robotique.
Pour que toutes les solutions envisagées dans le tableau trouvent leur place, il faudra toutefois réunir plusieurs conditions, relève la Fnams. D’abord des efforts de recherche et développement et des évolutions réglementaires. Ces méthodes devront également être économiquement viables. Et leur prise en main demandera des actions de formation et de communication.
Consulter le diaporama sur le désherbage de Jean-Albert Fougereux de la Fnams.