Cédric Pierre, Thibault Noilhetas, Aurélien Escure, Guillaume Joie et Pierre Cazes sont des jeunes éleveurs bovins allaitants en moyenne Corrèze. Les derniers épisodes climatiques les conduisent à une évolution leur stratégie fourragère. La pousse habituelle de ray-grass et de maïs ensilage largement répandus dans les exploitations du secteur, a été freinée lors des derniers étés excessivement chauds et secs. Une partie des prairies souffrent et se dégradent. Pour quatre membres du groupe qui ont des niveaux de chargement assez élevés (de l’ordre de 1,5 à 1, 7 UGB/ha), l’enjeu est de produire suffisamment de nourriture pour alimenter leur cheptel bovin. Leur vœu est aussi de produire de la qualité.
Evolution de la stratégie fourragère: du tonnage et de la qualité!
Il s’agit d’atteindre des rendements suffisants en tonnes de MS/ha, mais également de récolter des fourrages ayant une teneur élevée en MAT, et un bon impact sur la santé animale. En parallèle, le groupe s’oriente depuis quelques années vers le semis direct. Le caractère vallonné et pierreux de ce coin de moyenne Corrèze conjugué aux risques d’érosion, les encourage à progresser dans cette voie.
Les cinq éleveurs, qui communiquent régulièrement ensemble sur leurs pratiques respectives, ont donc modifié leur façon d’implanter les cultures. Et ceci, tout en renouvelant leur assolement. Ils cultivent désormais des méteils d’automne et quelques méteils de printemps, implantés en semis direct. Ces cultures annuelles «alternatives» sont composées d’une large palettes d’espèces associées, mixant graminées et légumineuses: vesce, trèfle, blé, féverole, seigle, avoine, … la liste est longue. Les membres du groupe sont toujours à l’affût de nouvelles espèces ou variétés qu’il conviendrait de tester localement.
Autoproduction des semences
Fait majeur: la grosse partie des semences de méteils est autoproduite. Pour cela, ils ont acheté ensemble un trieur d’occasion. Le coût de la semence est donc maîtrisé en comparaison du budget élevé que représenterait l’achat intégral de semences certifiées. Attentifs à ne jamais laisser un sol nu, certains tentent aussi le semis sous-couvert. En parallèle, ils développent le rechargement de prairies. Plutôt que de «casser» une ancienne prairie puis d’en refaire une nouvelle, ils préfèrent recharger la prairie déjà existante. Ce sursemis donne un regain de tonus appréciable à la prairie déjà en place.
Par l’intermédiaire de la cuma du canton de Seilhac qui avait elle-même amorcé la pratique du semis direct en achetant un Sulky Unidrill dans les années 90, le groupe dispose d’un semoir Bertini de 4m, acheté en 2016. Compte-tenu du prix d’achat exorbitant des semoirs SD neufs, ils ont prudemment misé sur un matériel d’occasion payé tout de même 30.000€ (nettement moins toutefois qu’un neuf). Il s’agit d’un semoir polyvalent à disques équipés de différentes trémies permettant de semer en une seule fois et à des profondeurs distinctes, des graines de calibres différents et un fertilisant minéral. L’appareil est conçu pour intervenir en présence de pierres ou sur des vieilles prairies. Grâce à son disque ouvreur, il trace un sillon avec un peu de terre fine pour y déposer la graine. Annuellement, les cinq exploitations réalisent 200 à 210 ha de semis direct par an.
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Surmonter les écueils
Le groupe mise désormais sur un semoir plus perfectionné. Les cinq agriculteurs espèrent gagner en régularité de profondeur et en praticité de manière à effectuer plus rapidement les réglages appropriés et les vidanges de l’appareil entre deux usages. Ils s’intéressent notamment au modèle proposé par le constructeur Deux-Sévrien Novag qui combine dents et disques. Leur matériel est spécialement conçu pour le semis sans labour. Les membres du groupe sont notamment intéressés par le caractère innovant de chaque élément semeur (2 demi-dents à ailettes, une de chaque côté d’un disque crénelé central) doté d’un vérin hydraulique.
La démarche collective entreprise par les exploitants de la cuma de Seilhac n’est pas sans écueils. Cette évolution de leur stratégie fourragère risque notamment d’être confrontée à la suspension annoncée du glyphosate. Il leur faut gérer aussi la maîtrise du désherbage rendue délicate en présence de cultures multi-espèces. Mais les premiers résultats du groupe sont prometteurs. Et les intéressés sont bien décidés à approfondir les pistes de solutions déjà esquissés pour conforter l’avenir de leurs exploitations bovines dans un contexte indécis.
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