Dans le Nord-Pas de Calais on n’a pas pour habitude de parler de sécheresse. Pourtant elle est bien présente. Chez Charles Lecornet, agriculteur à Beaumetz-lès-Cambrai il n’a plu que 24 millimètres depuis le 1er mars… et zéro à la mi-mai.
Et l’hiver plutôt sec n’a pas aidé les nappes à se recharger complètement. «J’ai quand même la chance d’avoir des sols profonds et une bonne réserve hydrique, reconnaît le jeune agriculteur. Les blés ne montrent pas de signes de faiblesse, sauf peut-être pour ceux semés tardivement.»
Stress aux plantes: des techniques à l’essai pour l’éviter
Il faut dire que Charles Lecornet travaille afin d’avoir une bonne qualité de sol. Pour cela, il n’hésite pas à apporter de la matière organique grâce aux couverts qu’il sème pendant les intercultures. «On m’a toujours dit que l’humus pouvait retenir jusqu’à 40 fois son poids en eau», aime-t-il à rappeler.
Pour le reste, il a un credo « je ne veux pas faire cumuler les stress aux plantes.» Pour cela, il fait tout pour qu’elles soient le plus fort possible. «J’utilise des acides aminés pour renforcer les plantes afin qu’elles puissent résister aux maladies, aux ravageurs et à tout autre stress, explique le jeune agriculteur. J’évite également au maximum de traiter ou d’appliquer des raccourcisseurs. J’ai peu de recul mais je remarque que mes essais sont plutôt fructueux.»
La question du quatrième apport d’azote s’est également posée pour Charles Lecornet de peur de réduire l’efficacité de l’azote avec ce temps sec. Il a donc choisi d’apporter une solution d’azote, de potasse, de phosphate et d’acides aminées en foliaires. «C’est l’alternative que j’ai trouvée pour amener tous les éléments nutritifs à la plante malgré le doute de l’efficience de l’engrais. J’ai déjà utilisé cette solution sur les pommes de terre et les endives auparavant», ajoute l’agriculteur.
Pommes de terre, pois, endives, tout y passe
Pour les pommes de terre plantées mi-avril, les levées sont en cours et le système d’irrigation a fonctionné sur le tiers des surfaces. «C’était avant tout pour bien refermer la butte et pour que les pommes de terre sèchent moins et qu’elles soient au frais, explique Charles Lecornet. J’essaye également de ne pas labourer les sols pour garder de la matière organique en surface.»
L’agriculteur, qui est également certifié HVE (haute valeur environnementale) axe son itinéraire cultural sur les biostimulants, de biocontrôles adjuvés, toujours dans l’optique d’avoir une plante robuste rapidement afin qu’elle subisse moins de stress.
Quant aux pois semés début avril, presque toutes les parcelles sont en fleur. «J’ai irrigué qu’une seule parcelle sur les deux et j’ai le même résultat, se félicite l’agriculteur. Celles où je ne suis pas intervenu bénéficie d’un taux de matière organique de 2,7%. C’est ainsi que je me rends compte que la matière organique joue un grand rôle.»
Le gros boulot reste les semis d’endives. Un vrai défi dans des terres aussi sèches. Pour travailler finement la terre, Charles Lecornet a dû multiplier les passages par deux, soit six. «Là il faudra prévoir un bâchage et un arrosage pour assurer la levée, reconnaît-il. La bâche évite au terrain de se dessécher et d’avoir une croute de battance.»
Si quelques millimètres sont tombés depuis, Charles Lecornet le soutient, «la sécheresse est bien installée, les quelques averses ne changeront pas la donne. Le climat actuel n’est pas serein. En plus d’avoir des prix très élevés, une nouvelle PAC, ou encore des élections, on navigue à vue. Et la météo ne nous aide pas. On ne se sait jamais ce qui peut nous arriver. Ce n’est pas durable.» Même s’il reste conscient qu’il se situe dans une zone plutôt privilégiée.