Le préfet a publié jeudi un arrêté d’utilité publique (DUP) pour la ZAC dite du « Triangle de Gonesse », zone de 280 hectares située entre les aéroports de Roissy-Charles de Gaulle et du Bourget, qui doit notamment accueillir une gare du Grand Paris Express, un centre d’affaires et le très contesté complexe de commerces et de loisirs Europacity.
« C’est une bonne nouvelle, mais ce n’est pas un feu vert à Europacity, ce n’est qu’une étape de la procédure », certes « extrêmement importante », a dit à l’AFP David Lebon, directeur du développement chez Europacity.
Ce projet à 3,1 milliards d’euros, piloté par Ceetrus, filiale du groupe Auchan, et le conglomérat chinois Wanda, serait, s’il se concrétisait, le plus grand investissement privé en France depuis la construction de Disneyland Paris en 1992.
Le préfet indique avoir pris l’arrêté après l' »avis favorable » émis en juillet par le commissaire enquêteur, à l’issue de l’enquête publique.
Ce dernier avait estimé que « l’opération projetée est globalement cohérente avec les objectifs annoncés et qu’elle présente des avantages certains pour la collectivité comme pour les populations », rappelle la préfecture.
La préfecture ajoute que « les réponses » et « les engagements » pris par le maître d’ouvrage, Grand Paris Aménagement, permettent de lever « les réserves » et prennent en compte « les recommandations » émises par le commissaire enquêteur.
La DUP va permettre à l’Etablissement Public Foncier d’Ile-de-France « d’acquérir les terrains nécessaires à la réalisation du projet », ajoute la préfecture, par voie d’expropriation s’il n’y a pas d’accord à l’amiable.
Une décision « incohérente »
La création d’Europacity sur des terres agricoles se heurte depuis des années à l’opposition des militants écologistes et des commerçants locaux qui dénoncent notamment son « gigantisme ».
Début mars, la justice avait donné raison aux opposants en annulant un arrêté préfectoral de septembre 2016 créant la ZAC du Triangle de Gonesse. L’Etat a fait appel de cette décision en mai.
Si la DUP doit permettre à Europacity de déposer des permis de construire, seule une décision de justice favorable à propos de la ZAC permettrait d’instruire ces permis, a souligné David Lebon.
Le préfet a pris une décision « incohérente » estime de son côté Bernard Loup, président du collectif d’opposants (CPTG): « le préfet a signé la DUP sur une ZAC qui n’existe pas juridiquement »
« Après la COP24, on se demande quelle est la politique du gouvernement par rapport à la transition écologique », a ajouté M. Loup, précisant que le collectif allait réfléchir à un recours contre la DUP.
Le préfet « prend une décision sans regarder l’impact sur les départements qui ne sont pas le sien », a également regretté auprès de l’AFP Alain Boulanger, porte-parole du collectif « Europas du tout », qui regroupe notamment des commerçants du Val-d’Oise, de la Seine-Saint-Denis et de la Seine-et-Marne, deux départements voisins.
Cette décision préfectorale intervient après une série d’annonces sur le projet.
En août, le promoteur d’Europacity s’était engagé avec l’État à améliorer son projet, notamment pour qu’il soit plus respectueux de l’environnement.
Un mois avant, l’ancien ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, avait qualifié Europacity de « folie des grandeurs ». Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement, a lui exprimé en octobre ses réserves à « titre personnel ».
Les promoteurs ont également intégré fin février qu’Europacity ne pourrait pas ouvrir comme espéré en 2024, quand Paris accueillera les jeux Olympiques. Le calendrier du projet a en effet été rallongé, alors que le gouvernement a reporté de trois ans, à 2027, la construction de la gare du Grand Paris Express desservant la zone.
De son côté, le préfet prévoit déjà la prochaine étape de la procédure administrative: le dépôt par le maître d’ouvrage (Grand Paris Aménagement) du « dossier d’autorisation environnementale unique » sur l’ensemble de la zone, a-t-il indiqué jeudi. Un dossier qui fera l’objet d’une nouvelle enquête publique.