Où positionner les tours? Quand les déclencher? Faut-il les coupler à des sources de chaleur? La proximité de plusieurs tours dans une même zone, génère-t-elle une synergie? Moult questions interpellent les viticulteurs qui s’intéressent aux tours antigel pour protéger leurs vignes contre les épisodes de gel. Le projet d’étude SICTAG prévu sur trois ans, vise justement à donner des éléments de réponse. La frcuma Centre Val de Loire, associée à six autres partenaires dont la cuma des Vignobles, a organisé un point d’étape sur ce sujet.
Gare à certaines pratiques culturales!
Certaines préconisations peuvent d’ores et déjà être formulées. Ainsi en termes de pratiques culturales, il est déconseillé selon Guillaume Delanoue de l’IFV, de tondre les rangs de vignes enherbés ou de réaliser un travail du sol sous le rang sept jours avant le gel. De même, autre opération à éviter: un travail dans l’inter-rang, quatre jours avant le gel. Cela peut générer un surcroît d’hygrométrie dans l’air ambiant. Et par conséquent, aggraver l’impact du gel sur la vigne.
Pendant les trois jours qui suivent un travail du sol, les mesures effectuées sur le vignoble indiquent en effet une augmentation jusqu’à 30% du taux d’humidité résiduelle (HR) observé au niveau des bourgeons aux heures les plus froides. Cela dépend du type de sols drainants ou non, et de sa température. Ainsi que du cumul de précipitations calculé depuis le 1 janvier. A noter: huit jours secs avec une température moyenne quotidienne supérieure à 15°C sont nécessaires pour retrouver une HR équivalente au niveau des bourgeons, selon le type d’itinéraire cultural. Et vingt jours seront nécessaires si les précipitations sont supérieures à 20mm par jour lors des vingt derniers jours. Autre renseignement pratique: les engrais verts dépassant le bourgeon ne protègent pas celui-ci contre le gel!
L’efficacité mesurée des tours antigel
Dans le cadre du projet SICTAG, les relevés climatologiques enregistrés en présence des tours antigel, attestent de leur efficacité. Pour les tours antigel fixes, quatre marques différents ont été mesurées. Résultat: la vitesse de la rafale déclenchée par la tour en action, s’élève à 80km/h dans la zone située entre 30 et 50m. C’est un souffle soudain et brutal, ressenti pendant vingt secondes. En gel «radiatif» (le gel radiatif résulte de l’accumulation d’air froid au sol) mesuré à 40m de la tour, celle-ci a permis de maintenir la température dans la parcelle à environ 0°C. Contre jusqu’à -1,5°C sur les parcelles non protégées par les tours. A noter: avec le chauffage (cheminée au pied de la tour), la température a également été maintenue à +0,5°C. Avec des pics de +1,5°C à chaque rotation de la tour.
Toutefois, l’efficacité des tours antigel n’est pas linéaire. Un large faisceau de paramètres conditionne leur efficience: relief, altitude, topographie, déclinaison des vents, présence d’éléments naturels de type forêt ou rivière, type de cépages… Et bien sûr la conception des tours: hauteur, nombre et type de pâles, etc… Dans ce domaine, les analyses requièrent des approches scientifiques à la croisée de la climatologie, de la physique des fluides et de l’agronomie…
Des tours antigel et antibruit…
La cuma Chancéene (Chancay) présidée par Vincent Peltier, regroupe cinq adhérents autour de tours antigel. Elle a présenté lors de cette journée, ses trois nouvelles tours arrivées en mars dernier. Juste avant l’épisode printanier de gel. Il s’agit de trois machines de la marque néo-zélandaise «Frost Boss», munies de cinq pales. Ces tours distribuées par les Ets. Cloué, sont réputées plus silencieuses que les trois premières acquises en 2021. Une qualité susceptible de faciliter l’acceptabilité de ces installations par les voisins dont certains manifestent leur opposition en raison du bruit que provoque ce type de machine. Ces tours qui valent un peu plus de 50.000€ l’unité (installation comprise), consomment environ 20l/h de GNR. Les responsables ont constaté leur efficacité au printemps 2022.
Des tours bloquées à 8km/h
Ils n’ont pas eu de dégâts de gel sur les surfaces protégées par ces tours. Certes, l’épisode de gel en 2022 était moins sévère que les précédents. Il est donc prématuré de dresser un bilan définitif selon les viticulteurs qui constatent également que le fonctionnement de ces tours s’interrompt dès que le vent dépasse les 8 km/h. Ce qui pourrait atténuer leur efficacité dans certaines circonstances climatiques… En complément des six tours antigel dont elle dispose, la cuma envisage aussi de s’équiper en 2023 de deux tours antigel mobiles.
Tous les partenaires de ce programme en conviennent: il y a encore de nombreuses questions en suspens. Dans ces conditions, le projet SICATG dont c’est la dernière année de programmation, aura sans doute une suite …
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