« Il y a des attentes sur le revenu, les éléments liés aux Etats généraux de l’alimentation, mais ce qui nous revient aussi c’est l’indignation, l’incompréhension, que cause l »agribashing' », rapporte Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA, le principal syndicat du monde agricole, à propos des échanges avec les agriculteurs. Par « agribashing », les agriculteurs désignent un ensemble de critiques jugées injustes et caricaturales, portant sur l’usage des pesticides ou encore les pratiques d’élevage.
M. Despey estime que le taux d’abstention est une « préoccupation pour tous les syndicats » car « l’enjeu de la participation est déterminant pour montrer aux pouvoirs publics que le monde agricole est structuré et peut porter des revendications et des solutions ».
Cette élection, qui permet tous les six ans d’élire les membres des chambres d’agriculture, est également un test pour la représentativité des syndicats. La FNSEA, alliée aux Jeunes agriculteurs (JA), reste pour l’instant majoritaire dans les chambres d’agriculture.
Jusqu’ici les élections aux chambres d’agriculture ont été les élections consulaires qui ont le plus mobilisé. Mais, le mouvement des gilets jaunes, très fort dans le monde rural, a montré que les Français se détournent de plus en plus des corps intermédiaires que sont les syndicats. Un sondage réalisé cette semaine sur le site terre-net.fr a estimé que l’abstention pourrait atteindre 57,3%, lors de ce scrutin.
Lors du scrutin de 2013, la participation avait déjà essuyé un recul, à 54,35%. La FNSEA avait obtenu 53,39% et les listes apparentées FNSEA/JA 0,54%, en recul par rapport aux élections de 2007. Avec 20,49%, la Coordination rurale (CR, plutôt conservatrice) a ravi la deuxième place à la Confédération paysanne (apparentée à gauche), arrivée troisième avec 18,54%, suivie du Modef (1,47%, proche du Parti communiste).
Agriculteurs écœurés
Pour le patron de la Coordination rurale, Bernard Lannes, l’abstention n’est pas forcément une mauvaise chose. Il y a des agriculteurs écœurés, qui n’iront pas voter, « mais ce sont surtout des gens qui votaient FNSEA », assure-t-il.
Il compte également sur le vote de « ceux qui sont en colère et qu’on va chercher avec le clic de ‘dégagisme’ sur internet. Ils vont voter gilets jaunes », ajoute M. Lannes, qui revendique des points de convergence avec le mouvement qui secoue la France depuis deux mois.
La Coordination rurale, qui préside quatre chambres d’agriculture dont une avec la Confédération paysanne, estime qu’elle pourrait remporter une dizaine d’autres chambres où les résultats étaient très serrés en 2013.
La Confédération paysanne a, elle, des ambitions plus modestes en terme de conquête de chambres, après avoir vu son score se réduire lors des deux derniers scrutins. L’enjeu pour elle est de convaincre la nouvelle population agricole « hors cadre familial » qui vient de s’installer et qui pense « que les chambres d’agriculture ne servent à rien », explique son secrétaire général, Nicolas Girod. « Si on gère des chambres d’agriculture, c’est pour en faire des outils de développement, au service de tous les projets, de tous les paysans et les paysannes dans leur diversité », assure-t-il.
« Il faut leur rappeler que les alternatives en agriculture, comme les cultures biologiques, ne sont possibles que parce que la Confédération pèse politiquement », ajoute son porte-parole, Laurent Pinatel.
Les résultats seront connus au plus tard le 8 février. Le 20 mars, les présidents des 89 chambres départementales et ceux des chambres régionales (13 en comptant l’Ile-de-France) se réuniront à Paris pour élire le président de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA).
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