Suite aux Etats Généraux de l’Alimentation, un projet de loi a été présenté en Conseil des Ministres, le 31 janvier 2018, comprenant 17 articles. La réglementation en matière de ventes de produits agricoles avait déjà été définie dans une loi en 2010, avec notamment une place plus importante accordée aux interprofessions. Mais cela n’a pas suffi à éviter la pression sur les prix à la production. Les rapports de force sont en effet tels que les centrales d’achat sont généralement en mesure de prescrire leurs conditions aux fournisseurs de produits alimentaires. Et par ricochet, ceux-ci limitent les prix des produits achetés aux producteurs, qui deviennent déconnectés des coûts de production.
Une loi plus contraignante
Une «charte d’engagement pour une relance de la création de valeur» a bien été signée en novembre 2017. Mais celle-ci n’a pas de caractère contraignant. Son application repose sur la bonne volonté des signataires. En revanche, la promulgation d’une loi a une portée obligatoire. Celle qui a été présenté au Conseil des Ministres comprend des dispositions susceptibles de modifier notamment le socle des contrats de vente des produits agricoles.
Des propositions à l’initiative des producteurs
Désormais, ce seront les producteurs, par l’intermédiaire principalement des OP ou AOP, et non plus les premiers acheteurs, qui communiqueront les bases des propositions «pré-contractuelles». Cette inversion des rôles devrait permettre de mieux tenir compte des coûts de production dans les propositions transmises aux acheteurs. Les producteurs énonceront à cette occasion les modalités retenues de fixation et de révisions des prix à partir d’indicateurs fiables définis par accords interprofessionnels. Ces informations resteront mentionnées par la suite dans le contrat de revente. Les entreprises de l’aval seront donc conduites à négocier, avec les distributeurs, des prix plus en phase avec la valeur réelle apportée par le producteur.
Seuil de revente à perte
Le relèvement de seuil de revente à perte pour les denrées agricoles est un autre élément favorable à une meilleure répartition de la valeur entre les maillons de la filière agroalimentaire. Dans le même esprit, il est prévu aussi dans la loi de mieux encadrer les promotions qui atteignent parfois des proportions insensées comme on l’a vu récemment lors de l’épisode sur les prix cassés des pots de Nutella… Enfin, la traditionnelle période de renégociation des prix avec les distributeurs est ramenée à 1 mois au lieu de 2. Pour s’assurer de la bonne application de ces nouvelles règles, des agents supplémentaires, habilités par FranceAgriMer, seront dépêchés. Quant au médiateur des relations commerciales agricoles, ses prérogatives seront élargies.
Plus de moyens de contrôle
Ce projet de loi encadre un peu la liberté de fixation des prix qui est l’une des clés de voûte de l’économie de marché. Rappelons-nous que dans les années 70-80, avant le courant de libéralisation de l’économie intervenu depuis, une part importante de l’activité économique en France était encore régulée par le contrôle des prix.
Le secteur alimentaire continue d’occuper dans l’économie une place singulière qui le distingue des autres secteurs. Le projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et agroalimentaire consacre cette particularité. Mais il difficile d’affirmer pour autant que cette loi garantisse des prix équitables aux agriculteurs. D’une part, en raison d’un marché agricole qui est de plus en plus ouvert sur le monde avec, pour conséquence, une concurrence exacerbée et davantage de volatilité. D’ autre part, la grande distribution demeure puissante et conserve d’importants moyens de pression pour imposer des conditions d’achat avantageuses pour elle…
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