Le groupe DEPHY Haut-Poitou (*) rassemble 14 viticulteurs qui travaillent, notamment, la question de l’entretien du sol et des couverts végétaux. Le 3 avril, il présentait, avec la chambre d’agriculture de la Vienne, une vitrine de couverts végétaux, chez Thierry Delumeau. Une occasion pour le trésorier de la cuma Viticole de Blaslay Chabournay de présenter la dernière acquisition du groupe: un semoir viticole. «L’an dernier, nous cherchions un moyen d’implanter des couverts pour réaliser ces essais et la concession MAS Vaonnaise nous a proposé de tester un semoir Gil. Il a donné satisfaction et nous avons décidé d’acheter le même.»
Un semoir simple
L’appareil est très simple: il comprend une caisse de semis avec une distribution à ergots, pour deux calibres de graines, 7 dents semeuses et une herse de recouvrement. La largeur de travail, 1,20m, convient bien pour des vignes majoritairement à 2m. Pas besoin de viser plus large car il faut en effet pouvoir passer ensuite avec un outil de destruction travaillant plus de 1,20m et éviter que des espèces grimpantes comme la vesce ne montent dans la vigne. Les dents possèdent un soc renforcé au carbure et muni de petites ailettes pour foisonner légèrement le sol.
Un ensemble simple, pas trop lourd, et d’un prix abordable: 5.600€. Il servira dans un premier temps sur environ 70ha. Vitesse de travail: environ 8km/h.
Un compromis pour la profondeur
Le sol de la parcelle de démonstration est assez compact comme l’a montré, bêche en main, Abdel Ourzik, pédologue à la chambre d’agriculture. Les passages de tracteur et surtout de machine à vendanger accentuent une tendance naturelle. Le semoir Gil n’a pas eu de difficultés à placer la semence en profondeur, en direct.
De nombreuses espèces ont été testées, seules ou en mélange: lin, pois, féverole, vesce, radis fourrager, avoine rude ou d’hiver, moutarde blanche, brune ou d’Abyssinie… Quand deux espèces d’un mélange ont des préférences de profondeurs différentes, par exemple féverole et avoine, il faut choisir un compromis entre les deux et surdoser un peu pour compenser le risque de pertes, a expliqué Fanny Pugeaux, animatrice DEPHY.
Les écueils du semis direct
La fermeture du sillon est importante pour la levée. Dans cet essai, certains viticulteurs ont choisi de rouler après le semis pour assurer. On connaît bien cette problématique lors du semis direct en grandes cultures. Doter le semoir d’un rouleau est envisageable mais ajoute du poids, de l’encombrement et en augmente le prix. Attention: le semis direct n’est pas la seule option pour les couverts viticoles, il est également possible de préparer un lit de semence.
Avant ou après les vendanges?
Les couverts de cet essai ont été semés le 5 octobre. Sur ce point, une question importante se pose en vendange mécanique. Soit on intervient avant les vendanges, pour bénéficier de suffisamment de chaleur avant l’hiver et ainsi s’assurer d’un bon développement. C’est notamment ce qui se pratique dans d’autres régions, en profitant du dernier passage d’entretien mécanique du sol, a précisé Fanny Pugeaux. Mais on doit anticiper suffisamment pour que le jeune couvert ne souffre pas trop du passage de la machine à vendanger. Il y a aussi le risque de manquer de fraîcheur du sol au démarrage. Soit on sème après les vendanges, avec plus de garanties quant à l’humidité du sol pour assurer la levée, mais aussi le risque que le froid arrive trop vite ensuite.
Pas de place pour la luzerne
Au fil de la visite de la plateforme, les viticulteurs ont constaté l’effet bénéfique des associations d’espèces: complémentarité entre racines pivots pour aller en profondeur et racines fasciculées pour affiner la structure, réduction des risques de mauvaise levée, couverture du sol contre les adventices, etc. Quelques-uns ont posé la question de la luzerne, une plante bien connue dans le Poitou et appréciée pour son enracinement profond. Elle est malheureusement trop gourmande et concurrencerait la vigne en eau et en éléments fertilisants, ont souligné les techniciens présents, tant côté chambre d’agriculture que semencier (Jouffray-Drillaud). La palette, fonction des sols et du climat, reste toutefois très large. Seule certitude: il faut les détruire ou les raser en fin d’hiver, avant les risques de gelée car la présence de cette masse végétale augmenterait alors les dégâts sur la vigne. Et en matière de gel, les cicatrices de 2017 sont à peine refermées chez certains viticulteurs du Haut-Poitou.
Voir à ce sujet le dernier Hors-série Viti d’Entraid’, avec un dossier sur les couverts végétaux.
(*) Contact : Jean-Philippe Perraud, Ingénieur Réseau Dephy Viti Haut Poitou, 0549447550.