Le statut actuel du fermage qui date de 1946, soulève plusieurs griefs. Il est souvent jugé trop rigide ou inadapté aux contraintes environnementales émergentes. Aux yeux des bailleurs, la rentabilité du foncier agricole est considérée comme étant modeste, même si cet investissement est réputé sûr. En effet, le montant des fermages est encadré administrativement. A 150 – 220 euros/ha de loyer par an, la rentabilité se situe autour de 2% l’année.
Débat sur les montant du fermage
Toutefois, libéraliser davantage les prix des loyers sur un marché du foncier potentiellement spéculatif, n’est pas sans risque. Dans un contexte de tension foncière, cela pourrait compliquer encore davantage l’installation des jeunes. Mais force est de constater dans le même temps, la réticence des bailleurs à louer. Certains préférant opter pour la délégation de travaux. D’où la proposition de laisser éventuellement un peu plus de souplesse en matière de modulation des loyers.
Prise en compte environnementale
Alors que le besoin d’encourager la transition agro-écologique est de plus en plus pressant, des experts en droit foncier évoque l’opportunité de développer «le bail rural environnemental». Principe: le bailleur qui loue sa terre à un exploitant qui s’engagerait à respecter de bonnes pratiques, bénéficierait d’un allègement fiscal. Ce qui viendrait compenser une minoration du loyer dès l’instant où le bail inclut des clauses environnementales. Jusqu’ici, les baux ruraux environnementaux sont essentiellement proposés par des collectivités ou des associations (ex: conservatoire d’espaces naturels, Terre de liens). L’engagement agro-environnemental pourrait revêtir plusieurs formes : réduction des produits phytos, maintien des prairies et des haies,… Il pourrait même aller jusqu’à des objectifs plus ambitieux tels que la conservation du taux de matière organique des sols!
Mieux formaliser le bail?
Alors que les baux à long terme sont notariés, d’autres demeurent verbaux. Et la réalisation d’un «état des lieux d’entrée» n’est pas imposée dans la loi. Ce qui peut donner lieu à des contentieux. Cette situation nécessiterait donc de mieux formaliser la rédaction des baux de manière sécuriser davantage les rapports locatifs. Mais cette orientation pourrait susciter l’opposition des bailleurs qui déplorent déjà le caractère excessivement contraignant du bail rural. Les propriétaires déplorent notamment les obstacles à sa résiliation. Ainsi, lorsque le bail arrive à expiration, le preneur peut prétendre de droit, à son renouvellement sauf si le bailleur décide de reprendre les terres pour les exploiter lui-même ou par l’un des membres de sa famille. Un cas de figure de moins en moins fréquent puisque beaucoup de propriétaires actuels ne travaillent plus aujourd’hui dans la sphère agricole…
Faciliter la cessibilité
Dans le même temps, le proportion d’agriculteurs non issus du milieu agricole, est plus nombreuse. Or actuellement, le Code rural interdit toute cession de bail sauf (avec l’agrément du propriétaire) au profit du conjoint participant à l’exploitation et aux descendants majeurs. Certains juristes proposent donc de rendre les baux ruraux transmissibles hors du cadre familial. Une première ébauche de cette démarche existe déjà avec le bail rural cessible (bail dérogatoire de dix-huit ans où le locataire cède son bail hors du cadre familial en contrepartie de certains avantages pour le bailleur). Dans certaines régions, de telles cessions de baux ruraux se pratiquent déjà, mais de manière occulte contre une rémunération du cédant (pas de porte). Un pratique pourtant interdite.
Agriculture urbaine, diversification, artificialisation, …
D’autres pistes de réflexions portent sur:
- la définition du périmètre juridique de l’activité agricole dans le bail rural, qui pourrait tenir compte aussi des activités de diversification développées par les agriculteurs.
- l’expérimentation d’un nouveau bail pour l’agriculture urbaine « hors-sol » pour mettre fin aux « conventions d’occupation précaire » et sécuriser ainsi la situation du preneur.
- l’abrogation du droit de résiliation pour cause d’urbanisation, qui conforte l’artificialisation des terres. Aujourd’hui, on considère que 100 ha disparaissent par jour sous le béton … Un sujet qui pourrait être au cœur d’une prochaine loi foncière (voir la tribune signée par une dizaine d’organisations) que beaucoup attendent au plus vite, dès 2021.
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