La diversité, pour moi, c’est une inquiétude et une interrogation. Comment faire évoluer nos cuma pour répondre à tous les besoins de matériel, entre un producteur bio, un éleveur herbager, des systèmes conventionnels? Comment acheter des matériels parfois onéreux pour un usage spécifique? Il y a des chantiers qui fonctionnent bien dans un contexte de diversité: sur l’herbe, avec de la grande largeur, la cuma propose un service qui répond à tout le monde. En revanche, sur d’autres activités, comme le binage où on va avoir des noyaux d’utilisateurs intéressés pour lancer une activité, plus petits, c’est plus compliqué. Même sur de l’ensilage, qui concerne encore tout le monde, entre des exploitations avec des surfaces importantes, et d’autres qui auront d’autres objectifs prioritaires que le débit ou la puissance de la machine, il faut faire des compromis.
La diversité est croissante et se niche partout, par exemple, sur le produit sorti par UTH. Dans une cuma, d’une manière générale, la délégation des travaux suscite des demandes. De plus en plus. Autre exemple: chez nous, nous avons eu un, puis deux, et nous en sommes à trois tracteurs. Tout le monde profite de ces outils efficaces, parfois complexes, et d’un même tarif… Mais bien sûr, il y a aussi des gens qui ont du mal à s’y retrouver. Déjà, parce que des jeunes en pleine forme ne voient pas le coût de la délégation de la même manière qu’un agriculteur qui a déjà été confronté à des soucis de santé. La difficulté sera aussi de retenir les plus grosses exploitations, alors que nous avons aussi besoin des plus petites dans les groupes.
La cuma est un endroit où l’on peut prendre des risques
L’enjeu de la diversité il est là. Maintenir une offre qui corresponde à tout le monde. Une première réponse sera aussi qu’il faut que tout le monde s’engage; c’est un point important, car la notion d’engagement chez les jeunes n’est plus vraiment présente.
La diversité c’est une contrainte, quand on est responsable de cuma, que l’on doit faire cohabiter ces visions, ces opinions différentes. C’est aussi un moteur, puisque ce rôle de responsable est de faire d’une demande particulière un projet collectif. Ainsi vit le groupe, parfois en se trompant, comme lorsque nous avons acheté un retourneur d’andains pour un très petit nombre d’adhérents. Aujourd’hui, il faudrait le revendre, car le modèle que nous avons choisi n’est pas adapté à un usage collectif, ni aux autres outils de notre chaîne de fenaison. Ce risque, on l’a pris en cuma et ce n’est pas une catastrophe. La cuma permet ça, comme le noyau a pris décision ensemble, c’est aussi plus facile à porter pour tout le monde. Tandis que le projet de retourneur d’andains n’est pas pour autant définitivement retourné dans ses cartons. Car pourquoi pas, un jour, aller sur d’autres matériels grande largeur ? avec d’autres cuma ? C’est peut-être par la diversité des cuma que nous pourrons répondre à la diversité des agriculteurs.
Une force pour les cuma Laurent Dalibard, cuma de Martigné-sur-Mayenne : Pour moi, c’est plutôt une force. Elle est synonyme de complémentarité. C’est vrai aussi du point de vue du matériel. Dans notre cuma nous avons aussi quelques adhérents en agriculture biologique. Leurs objectifs sont différents par rapport à un éleveur en conventionnel, leurs contraintes aussi. Ainsi, ils font plutôt des cultures de printemps plus tôt et celles d’hiver un peu plus tard. Finalement, on trouve des complémentarités et de toute manière il faut toujours composer dans un groupe. C’est surtout une question de tempérament… il faut un tempérament cumiste partagé parmi le groupe. La diversité est aussi le thème conducteur du numéro Entraid spécial Mayenne 2018. D’autres élus de la fédération y développent le sujet. |