Les multiples avantages des couverts végétaux ne sont plus à démontrer. Placés au cœur de l’agriculture de conservation des sols, ils sont désormais très développés en grandes cultures où leurs effets bénéfiques ont largement été mis en évidence : protection des sols contre l’érosion et la battance, enrichissement en matière organique, fixation des éléments fertilisants et leur restitution aux cultures, notamment en azote grâce aux légumineuses, amélioration de la structure de sols, limitation des stress hydriques, etc.
«Outre leurs effets à court terme de protection contre l’érosion voire, dans certains vignobles du Sud contre un rayonnement solaire excessif, on constate sur le moyen et long terme un meilleur fonctionnement du sol qui se traduit par une meilleure fertilité physique (structure) et chimique (minéralisation, azote…) », indique Christophe Gaviglio, ingénieur mécanisation du vignoble à l’IFV Pôle Sud Ouest.
En redonnant au sol et à l’agronomie une place centrale, et notamment grâce à leur impact positif sur la plante et l’environnement, la technique des couverts végétaux s’inscrit dans les objectifs fixés par les pouvoirs publics en matière d’agroécologie.
Des effets positifs… et négatifs
C’est dans ce contexte que se développent les couverts végétaux dans les vignobles français, qu’ils soient conduits en culture biologique ou raisonnée. Il convient toutefois d’adapter les itinéraires d’enherbement en fonction de la climatologie, du terroir et des objectifs de production, en vue de favoriser les impacts positifs du couvert et d’en minimiser les effets négatifs.
En effet, dans certaines situations, dès lors qu’ils sont mal maîtrises, ils peuvent entraîner une concurrence hydrique et azotée préjudiciable au végétal et, in fine, aux rendements et à la qualité des vins. Face à un tel changement de pratiques d’entretien du sol qui fait appel à du matériel spécifique tant pour le semis que pour la destruction du couvert, les viticulteurs vont devoir définir très précisément les objectifs ciblés : augmentation de la fertilité minérale des sols, augmentation de la matière organique stable, protection des sols…
«Pour répondre à ces différents objectifs, il existe tout un panel de possibilités. En fonction des espèces semées, de la date et du type de semis, de la date et du mode de destruction, les effets peuvent en effet être assez variables», indique l’expert IFV.
Quand et comment semer ?
A l’exception d’enherbements destinés à maîtriser la vigueur ou favoriser la portance, la mise en place d’un couvert n’est pas courant en viticulture. Il est alors important de noter qu’elle fait appel à des compétences précises allant de la préparation du sol à la destruction du couvert dans le cas d’enherbement temporaire ou semi-permanent, en passant par la mise en oeuvre du semis qui doit nécessairement prendre en compte la taille des graines, la densité de plantation, les conditions de sol, le type de semis (direct sous couvert ou avec préparation du sol).
Une bonne préparation du sol visant à assurer un bon contact entre le sol et la graine est garante d’une meilleure levée. La date d’implantation d’un semis dépend du type de couvert à implanter mais aussi des conditions pédoclimatiques.
Avant les vendanges, il faut veiller à réaliser le semis avant une pluie dans un sol bien préparé afin de s’assurer une bonne levée. Dans un tel cas et en situation de vendanges mécaniques, subsiste toutefois la problématique du passage de la machine à vendanger dans ces rangs récemment semés. Le semis direct constitue alors une autre solution puisqu’il peut être réalisé sur un sol non préparé.
Travailler le sol ou pas
Après les vendanges, les conditions de sol ne sont pas toujours favorables. Dans ce cas, il est fortement conseillé de travailler le sol en vue de favoriser les levées et prendre en compte que plus le semis est précoce, meilleures sont la production de biomasse et les effets sur le sol. De l’implantation d‘une seule espèce avec un semoir basique visant simplement à couvrir le sol, la technique du couvert végétal peut aussi concerner l’implantation de deux ou plusieurs espèces à l’aide d’un matériel spécifique.
A un stade plus avancé de maîtrise de la technique des couverts végétaux, une couverture permanente du sol peut être envisagée. Une succession de semis réalisés grâce à un semoir direct et de destructions permet d’atteindre cet objectif. Dans cette situation, il est crucial de trouver des espèces peu concurrentielles en période estivale.
Comment détruire les couverts végétaux ?
Différentes méthodes de destruction des couverts végétaux existent. Qu’il s’agisse du roulage, de la tonte, du broyage ou de l’enfouissement, chacune vise un même objectif, la restitution au sol de la biomasse fournie par le couvert. En revanche, leur mode de destruction a un impact sur la vitesse de dégradation du couvert ainsi que sur sa minéralisation.
«Le premier élément à prendre en considération concerne le développement végétatif de la vigne. Le pilotage de ces destructions doit se faire en lien avec les besoins de la vigne», explique Christophe Gaviglio. L’idée étant de laisser le couvert se développer suffisamment longtemps tout en limitant ses effets négatifs, et de faire coïncider sa période de forte minéralisation avec les besoins de la vigne.
Outre l’organisation du travail sur l’exploitation, la sensibilité de l’espèce au roulage constitue un élément déterminant à prendre en compte pour le choix de la méthode. Si le roulage reste la technique la plus intéressante en termes de vitesse de réalisation du chantier de destruction, sa limite réside parfois dans une destruction incomplète du couvert, notamment s’il est composé de plusieurs espèces qui ne sont pas toutes en fin de cycle.
Définir ses objectifs
«Qu’il s’agisse d’implantation des couverts ou de leur destruction, chaque vigneron va devoir raisonner ses choix en fonction des objectifs recherchés en termes de production mais aussi d’un point de vue agronomique comme peuvent l’être la protection des sols contre l’érosion, la reprise en main de la fertilité des sols, ou encore l’amélioration du taux de matière organique.»
Par exemple, dans le cas d’un objectif d’amélioration rapide de la fertilité minérale du sol, le broyage combiné avec un enfouissement sera le plus efficient car sa décomposition se fera rapidement avec une minéralisation importante dans la mesure où les conditions climatiques le permettent.