La production d’énergie en cuma est un sujet récurrent. Mehdi Miftah, le « Monsieur énergie » à la fncuma, apporte ses conseils. Ce dernier a en effet trois missions principales : aider au développement des projets relatifs à l’énergie qui se mettent en place dans les territoires, faire de la veille technique, économique et juridique, et recenser les unités de production dans le réseau des cuma. Il répond à nos questions.
Quel intérêt d’être en cuma pour la production d’énergie ?
Pour la production d’énergie issue de méthaniseurs ou de bois, l’intérêt de la cuma est de former un groupe. Celui-ci permet aux adhérents de se connaître et de monter le projet ensemble. En plus, le groupe peut profiter d’un accompagnement et d’informations. La cuma permet aussi de partager et d’investir dans le matériel nécessaire à la production d’énergie.
Qu’en est-il pour le photovoltaïsme ?
Quant à la production d’électricité grâce aux panneaux photovoltaïques, les statuts d’une cuma permettent de ne pas créer une société annexe. Mais il faut tout de même être attentifs au devenir des recettes issues de cette activité. Celles-ci doivent financer autre chose (un bâtiment, une unité de séchage, le chauffage, par exemple) car la cuma ne peut redistribuer les bénéfices.
Quelles sont les étapes à respecter ?
À partir du moment où un acteur ou groupe décide d’entamer un projet, il y a au minimum quatre étapes.
La définition du projet qui permet de mieux se projeter, pour décider d’aller plus loin ou non. Il convient de définir à ce stade le type de projet, le site et d’évaluer le gisement. Il faut ensuite échanger auprès de personnes ayant réussi des projets à ce moment. Sans oublier de réaliser des études préliminaires. Il s’agit là de structurer le projet avec la forme juridique adéquate, une étude de faisabilité technico-économique mettant en évidence l’ensemble des coûts et des gains. Un travail avec un conseiller ou un bureau d’étude peut être adapté ici. Et enfin, avertir les parties prenantes, investisseurs et acheteurs. Le dialogue avec des élus ou représentants de collectivités territoriales ou communes, permettra la recherche de financeurs et aussi d’acheteurs en aval dans le cas où cela est nécessaire. Dans tous les cas, situer la place de son projet dans la filière énergétique et identifier les liens avec les acteurs extérieurs sont primordiaux pour sa réussite. Enfin, il ne faut pas oublier les démarches administratives qui permettent de consolider le projet (demande de raccordement, permis de construire, plan d’épandage, ICPE…).
Quels peuvent être les obstacles ?
Dès le début, c’est le frein administratif qu’il faut lever. Notamment sur l’acceptabilité du projet par les riverains et les élus locaux dans le cadre d’une méthanisation. C’est ce point-là qui prendra le plus de temps. Pour les projets concernant le bois énergie, la valorisation économique reste la partie la plus difficile puisqu’il faut trouver des débouchés intéressants. Enfin, en photovoltaïque, c’est le raccordement au réseau qui peut être le plus coûteux et le plus difficile techniquement.
Où en sont les agriculteurs ?
L’agriculture, au sens large, est à un tournant. Il est important qu’elle prenne le virage. C’est le modèle de production d’énergie renouvelable qui est en jeu. Doit-elle laisser les grosses structures agricoles ou non s’emparer de la question comme c’est le cas pour d’autres productions ? Ou doit-elle promouvoir le modèle agricole familial en permettant à toutes les exploitations de produire à leur échelle de l’énergie ? Pour le moment, il n’y a pas de prise de position sur ce sujet. Mais il est important qu’il y en ait une dans les prochains mois. L’agriculture doit y trouver son intérêt avant de développer ces projets. Tout cela dans le but de donner aux pouvoirs publics quelques orientations.
Quels sont les projets atypiques que vous avez suivis récemment ?
J’ai vu une cuma qui construit un bâtiment avec au-dessus des panneaux solaires. Le but est que l’électricité produite alimente un séchoir en grange mais qui peut être revendue directement aux adhérents. Par ailleurs, l’électricité non consommée est alors stockée dans une batterie virtuelle. C’est un contrat spécifique qui permet de consommer l’électricité produite auparavant lorsque celle-ci manque. Il y a également une cuma qui a décidé de valoriser le bois de ses haies qui sont cultivées de manière durable. L’objectif est ici de produire de l’énergie ligneuse mais dans le respect de la biodiversité, de la pousse de l’arbre ou encore de l’intérêt pédoclimatique. Enfin, il y a également un projet de couverture de fosses à lisier qui permet ensuite de récupérer le méthane. Je trouve cette solution assez facile d’accès et prometteuse. Surtout quand on se penche de plus près sur le carburant potentiel qui pourrait ensuite être consommé par les tracteurs.
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