Cette lettre intervient alors que l’exécutif doit dévoiler prochainement un « plan d’action » sur l’application du Ceta, après la remise d’un rapport d’experts constitué en raison des craintes liées aux effets de l’accord sur l’environnement et la santé principalement. Ces experts y regrettaient le « manque d’ambition » environnementale du traité.
Dans son courrier, le groupe de travail LREM, mené par les députés Jacques Maire, vice-président de la commission des Affaires étrangères, et Matthieu Orphelin, membre de la commission du Développement durable et ancien bras droit de Nicolas Hulot, propose notamment des mesures concernant l’importation de viande.
C’est un des volets qui suscite le plus d’inquiétude, tant sur le volet sanitaire (règles canadiennes plus souples sur l’usage d’antibiotiques ou d’accélérateurs de croissance) qu’économiques, avec une concurrence accrue pour des éleveurs français déjà en difficulté. Outre des études d’impact économique sur l’élevage français, le groupe de députés suggère, comme le groupe d’experts, d’étudier un étiquetage spécifique des viandes ou produits à base de viande destinés à informer les consommateurs sur l’usage de produits comme les antibiotiques.
Ils recommandent également de renforcer les contrôles sur les produits interdits dans l’UE (boeuf aux hormones, saumon transgénique) et d' »étendre le moratoire français actuel aux nouveaux OGM », une nouvelle classe d’OGM susceptible d’échapper à la réglementation en vigueur.
Sur le climat, les députés de la majorité proposent également des « dispositifs législatifs ou réglementaires nationaux en 2019 pour dissuader ou taxer très fortement » les hydrocarbures dits non conventionnels (sables bitumineux, pétrole et gaz de schiste, etc.). Cette taxation se ferait « quelle que soit leur provenance » pour rester conforme aux règles européennes.
Comme l’avait également recommandé la commission d’experts, les élus proposent la mise en place d’un « veto climatique » qui empêcherait les investisseurs de former des recours devant les tribunaux d’arbitrage sur des mesures concernant la lutte contre le dérèglement climatique. Une des craintes des adversaires du Ceta est de voir se développer des recours d’intérêts économiques contre les mesures environnementales des Etats devant ces tribunaux privés et opaques.
Enfin, la lettre recommande des mesures destinées à renforcer la transparence des négociations et des futurs accords de libre-échange, comme celui avec le Mercosur, l’union douanière sud-américaine. Elle propose « la mise en place d’une commission de transparence », qui inclurait « la société civile et les parlementaires ».
« Il importe aux députés LREM que la mise en oeuvre du Ceta, dans ses dispositions potentiellement risquées, soit mise sous contrôle », assure le groupe dans un communiqué. « Nous agissons avec transparence et exigence, fidèles à notre volonté de travailler en co-construction avec le gouvernement », ajoute leur président Richard Ferrand, cité dans ce communiqué.
Ratifié en février par le Parlement européen, le Ceta doit encore être adopté par les parlements nationaux. Mais il est entré en vigueur de façon provisoire le 21 septembre. « Les accords commerciaux donnent lieu à des interrogations et à des débats, il n’est pas dans mon intention de nier ces débats », avait déclaré lundi à Bruxelles le Premier ministre Edouard Philippe (issu de LR), renvoyant « le moment venu » à un plan tenant compte des conclusions de la commission d’experts.