Il ne reste plus beaucoup de temps avant le 29 mars 2019. A cette date, le divorce entre le Royaume-Uni et l’Union européenne devrait être officiellement consommé. Une telle rupture peut faire des dégâts si les deux parties ne se sont pas mises d’accord préalablement sur un accord de séparation «amiable». Une issue brutale serait une mauvaise nouvelle pour l’agriculture et notamment, pour les filières animales en première ligne sur ce sujet.
Partenaire commercial majeur
Dans un communiqué, l’APCA exprime sa profonde inquiétude: «Le Royaume-Uni représente notre 3e débouché pour nos exportations agroalimentaires. A l’inverse, la France est le 2e plus important fournisseur de produits agroalimentaires du Royaume-Uni. Dans le cas d’une sortie sans accord, certaines de nos filières pourraient subir de très lourdes pertes financières. Cela représenterait un coût de plus de 500 millions d’euros pour les exportations de nos filières agroalimentaires, sur une perte estimée au total à 3 milliards d’euros pour l’économie française. L’agroalimentaire serait le 3e secteur économique le plus touché. Cet impact économique pourrait être d’autant plus important si l’on y ajoute les coûts liés à la dépréciation de la Livre Sterling, ainsi que les surcoûts liés à la restauration de droits de douane, à la logistique et à l’introduction de nouvelles normes sanitaires pour franchir la frontière britannique. De plus, malgré la qualité reconnue de nos produits, l’inflation alimentaire, que subissent déjà les consommateurs britanniques, amènerait sur le long terme à une réduction de leur pouvoir d’achat et donc de la demande de nos produits.»
Balance commerciale excédentaire
Le site internet « Toute l’Europe » détaille la balance commerciale excédentaire que l’UE affiche avec le Royaume-Uni: «47 milliards de dollars sont exportés vers le Royaume-Uni depuis l’UE, soit près de 9% des exportations agricoles et agroalimentaires européennes, alors que 4% des importations agricoles et agroalimentaires de l’UE-27 proviennent du Royaume-Uni, pour un montant de 17 milliards de dollars.» Un Brexit sans accord risquerait fort de déstabiliser dans les mois qui suivent le marché agricole européen.
Paradoxe: l’enjeu agricole et alimentaire a été peu discuté au moment du référendum. Pourtant, en cas de «No Deal», les tarifs douaniers habituels entre l’UE et un pays tiers s’appliqueraient au détriment des consommateurs. Les Britanniques pourraient chercher alors à développer leur propres industries agro-alimentaires. Ils risqueraient aussi de s’approvisionner davantage sur d’autres continents ou dans des pays émergents à des prix bon marché. Mais cela se ferait sans les normes de qualité et de traçabilité, correspondantes au standard européen!
Côté européen, selon une note d’analyse du Think Tank « Farm Europ » (voir résumé ci-dessous), les exportations des produits laitiers, seraient remises en cause. Idem pour les exportations de viande qui seraient concurrencées par d’autres pays compétitifs.
Des filières exposées Dans une publication récente, le think Tank Farm Europ a détaillé les enjeux commerciaux du Brexit pour chaque filière animale Lait Les opérateurs laitiers français ont expédié plus de 270.000 tonnes de produits laitiers l’an dernier, dont 89.000 tonnes de fromages tels que le Brie ou le Camembert très appréciés. Le Royaume-Uni absorbe l’équivalent de 3% de sa production laitière française. Le défi du Brexit pour le secteur laitier est significatif (3,7 milliards d’euros d’exportations dans l’UE27). L’Irlande (875 millions d’euros) mais aussi la France (678 millions d’euros), sont en première ligne sur le marché britannique. Viande bovine Plus d’un milliard d’euros de viande bovine de l’UE27 vont en direction du Royaume-Uni. Majoritairement en provenance d’Irlande (785 millions d’euros). Les Irlandais pourraient être contraints de trouver de nouveaux débouchés sur le marché mondial mais aussi dans le marché domestique européen. Avec un impact sur ce secteur déjà dans une situation économique précaire. Porcs L’Union Européenne à 27 bénéficie d’un solde commercial très excédentaire dans le secteur de la viande porcine, de plus de 800 millions d’euros en 2017 (pour plus d’un milliard d’exports). Les producteurs danois, allemands, néerlandais et irlandais seront les plus affectés. Le Brexit, conjugué avec l’embargo russe, induirait une dépendance accrue d’exports de l’UE au marché chinois. Volailles L’Union Européenne à 27 exporte plus 1,2 milliard d’euros vers le Royaume-Uni, avec un surplus commercial encore plus important que les autres viandes, d’un peu moins de 900 millions d’euros. Les Pays-Bas et la Pologne sont de loin les plus gros exportateurs dans ce secteur. |