Pour M. Bové, l’initiative commerciale de Lactalis, propriétaire de la marque Société, « menace l’ensemble du modèle de l’appellation d’origine », ce label décroché dès 1925 par le roquefort produit avec un cahier des charges rigoureux dans la localité du même nom.
Selon lui, l’emballage du bleu incriminé, vendu depuis le 1er avril, ressemble tellement, « comme deux gouttes d’eau », à celui du roquefort Société, leader du secteur, qu’il y a « tromperie du consommateur ».
Ce dernier serait ainsi incité à privilégier le nouveau produit, moins cher et aux normes de fabrication moins contraignantes. « On tente de placer un ersatz », s’indigne l’eurodéputé écologiste.
Sollicité par l’AFP, le groupe rejette l’argumentaire: « Nous avons été attentifs à ne pas créer de confusion auprès du consommateur », objecte Christian Gentil, directeur général de Roquefort Société.
Visant à « conquérir de nouveaux consommateurs » pour qui le roquefort est « trop fort », ce produit est « complémentaire » à la gamme, explique-t-il.
Mais sans respect du cahier des charges du véritable roquefort (lait cru de brebis, troupeaux locaux, affinage naturel…) « il y a un risque que le marché du roquefort s’effondre et que la production soit délocalisée », met en garde la CFDT locale.
Confrontée à un recul des ventes depuis le début des années 2000, la filière emploie quelque 1.700 salariés et fait tourner quelque 2.000 exploitations laitières dans le bassin de production.
Le nouveau fromage, à base de lait pasteurisé sans indication d’origine, est « fabriqué à Rodez, demain ce pourrait être à Laval », siège de Lactalis, « ou à l’étranger », s’émeut la syndicaliste Ghislaine Fabre.
« Le lait est bien entendu issu de notre zone de collecte de l’Aveyron, dans des exploitations où les brebis pâturent dès que les conditions climatiques le permettent, nourries sans OGM », contre là encore M. Gentil.
Cette innovation peut au contraire « favoriser l’emploi sur le territoire et développer les besoins en volume de lait, donc conforter notre bassin de collecte », insiste-t-il.
Ces explications ont été fournies aux salariés, confirme Mme Fabre, mais sans rassurer son syndicat.
M. Bové souhaite pour sa part que la justice soit saisie, au nom de la lutte contre les copies et malfaçons des AOP.