A l’exception du nord de la France, où les précipitations ont retardé les chantiers, les betteraves sont quasiment toutes arrachées. Le cru 2022 est, encore une fois, décevant. La production est en effet estimée, selon la CGB (confédération générale des planteurs de betteraves), à seulement 32 millions de tonnes (contre 35 en moyenne cinq ans).
Un recul constant des surfaces betteravières
« La baisse des surfaces emblavées se poursuit, précise Emmanuel Pigeon, directeur de la CGB des Hauts-de-France. Entre 2021 et 2022, nous avons perdu 3 000 hectares de betteraves en France. C’est moins que les années précédentes mais ce phénomène ne s’arrête pas pour autant. »
Outre les surfaces en berne depuis trois ans, les rendements aussi ne sont pas prometteurs. C’est une tendance que les agriculteurs déplorent. Cette année, ce n’est ni la jaunisse, ni les maladies qui ont joué sur les résultats mais c’est bien le manque d’eau qui a fortement limité le développement des racines. Les herbicides moins efficaces, les adventices sont aussi venus concurrencer la plante.
Un rendement de la récolte de betteraves de 80 t/ha
« Pour le moment, on évalue le rendement de la récolte betteravière dans les Hauts-de-France de 2022 à 82 t/ha, lance le directeur. C’est légèrement au-dessus de la moyenne française qui se situe à 80 T/ha. On observe dans ces résultats un gradient Nord-Sud assez impressionnant. »
Ainsi, les rendements dans le Nord-Pas de Calais ont tendance à se situer au-dessus de la moyenne des 5 ans, alors que dans le sud du bassin de production, ils décrochent.
Ces baisses de rendement s’accompagnent, cette année, d’une hausse des coûts de production. Selon la CGB, le prix du carburant a été doublé, celui du gaz multiplié par 6 et celui des fertilisants par 3.
« On estime le coût de production d’un hectare de betteraves à 2 600 euros, ajoute Emmanuel Pigeon. Celui-ci ne cesse d’augmenter. En 3 ans, il a bondi de 35 %. »
Betteraves et sucre : des marchés porteurs
En parallèle, le prix du marché du sucre a aussi pris des couleurs. Les hausses ont été impactées dans les nouveaux contrats de vente de sucre conclus cet été. Ces derniers représentent 75 % des volumes de sucre commercialisés.
En septembre dernier, le prix du sucre s’élevait à plus de 490 €/t. Depuis, les prix poursuivent leurs ascension, rendant le sucre de canne un peu moins cher et donc plus concurrentiel. Par ailleurs, le marché de l’éthanol, débouché important de nos betteraves, reste porteur avec l’envolée des prix du pétrole.
« Ce débouché permet d’affirmer encore plus le besoin d’avoir une betterave productive, explique Emmanuel Pigeon, qui aime à rappeler qu’un hectare de betteraves permet de parcourir 100 000 km. Cela donne du poids supplémentaire dans les arbitrages politiques. »
Donner un nouvel élan à la filière
Si bien que, si les niveaux de production restent tels qu’ils sont, et que les rendements ne se déplafonnent pas, les prix d’achat de la betterave doivent être élevés pour continuer à motiver les agriculteurs français.
« À ce jour, avec les niveaux de prix actuels et un rendement de 85 t/ha, il faudrait un prix de la betterave de 35,9 €/t pour absorber les coûts de production », explique le directeur des Hauts-de-France. Avec un prix annoncé à 40 €/t minimum pour les betteraviers de Tereos, nul ne sait si cela suffira à redynamiser la filière. Surtout face aux autres cultures plus simples à mener et autant rémunératrices.
Il faut dire que la betterave, au niveau technique, n’est pas toujours appréciée. Récoltée parfois dans de mauvaises conditions, les sols peuvent être matraqués. Dans ce cas, cela se ressent sur les rendements de la culture suivante, souvent du blé.
De plus, l’arrêt des néonicotinoïdes a plombé les intentions d’emblavements des agriculteurs les plus touchés malgré les dérogations d’utilisation. Les recherches variétales, si elles restent prometteuses, ne permettent pas de travailler sur la résistance aux maladies et à la sécheresse simultanément.
Toutefois, les rendements de cette année ont tout de même montré que les betteraves ont une capacité de résistance face au manque d’eau par rapport aux autres cultures de printemps. De bons prix et des solutions techniques permettront peut-être d’endiguer les vagues d’abandon de cette culture pour les prochaines campagnes.
La campagne de transformation des betteraves s’achève
Les arrachages de betteraves, réalisés dans de bonnes conditions globalement, ont débuté plus tôt que prévu à la demande des industriels. Leur objectif, qui sera atteint dans la plupart des sucreries françaises, était d’achever la transformation avant le début janvier 2023 pour ainsi, ne pas subir la hausse des coûts de l’énergie.
Les planning ont alors été avancés par certaines sucreries. « Une décision apprécié des betteraviers et indemnisée à la hauteur de la perte de rendement globale, estime Emmanuel Pigeon, directeur de la CGB des Hauts-de-France. Cela a permis aux betteraviers situés dans des zones très sèches de trouver un peu plus de rentabilité à leurs cultures. »
Les températures douces d’octobre ont ralenti la cadence des chantiers. Le salissement des tas a aussi perturbé quelque peu le débit de transformation à l’usine.
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Les arrachages estivaux de betteraves débutent.