« Les sols dégradés sont à l’origine de la fin des civilisations« , avertit Rafiq Islam, directeur du programme sol, eau et bioénergie à l’université d’état de l’Ohio (Etats-Unis) et expert en santé du sol, séquestration du carbone et recyclage de la matière organique. Comme trois autres de ses concitoyens, il était l’invité d’une journée Co- organisée par l’Association Base et Sols Vivants le 17 mars à Gironville (77).
Pour ce spécialiste américain, les « bons » sols dans le Monde se situent dans la Région des Prairies (Etats-Unis – Canada), dans la Pampas et le Gran Chaco (Argentine-Bresil), en Asie Centrale et dans les steppes (Pologne-Russie-Ukraine) et « un peu » au Nord-Ouest de la Chine. Il les qualifie ainsi car ils disposent d’une quantité importante d’humus et de nutriments.
Pour Rafiq Islam, l’agriculture de conservation cultive le compromis entre l’aspect productif et la nécessité de préserver les sols avec des systèmes « dominés par les champignons« .
160 millions d’ha cultivés en semis direct
« Avec le changement climatique, la hausse des températures va d’un côté augmenter les surfaces de terres arables par la fonte des glaces au Canada et en Russie, et de l’autre, provoquer des inondations (montée des eaux de 1 m d’ici à 2100) et des sécheresses qui vont faire perdre le potentiel actuel« , explique le chercheur américain qui ajoute toutefois que la « pression des adventices devrait s’accroître« .
Aujourd’hui, près de 160 millions d’ha dans le monde sont cultivés en semis direct (80 Mha en Amérique du Sud, 60 Mha en Amérique du Nord et 20 Mha en Europe).
« Aux Etats-Unis et au Canada, il est de plus en plus utilisé pour gagner en efficacité sur de plus grandes surfaces« , noté Jerry Grigar, agronome en chef du service de l’USDA-NRCS du Michigan.
Cet Homme qui cultive également une ferme de 60 ha en No-till et semis direct à calculé que la perte de carbone sur 24h dans les sols est de 10g/m2 en semis direct et s’élève à 229g/ m2 avec un travail du sol à 28 cm de profondeur. « Pour garder le carbone, Il faut compenser en gagnant plus de matière organique que ce que l’on perd » grâce, notamment, aux cocktails de couverts végétaux (graminées- légumineuses – crucifères).
Stocker davantage de carbone c’est possible
L’université de l’Ohio a beaucoup travaillé sur le sujet du stockage de carbone. Le chercheur Vinayak Shedekar a même élaboré des outils pour permettre aux agriculteurs de calculer la part de carbone dans leurs sols. www.cffcarboncalculator.org.
Pour 100g de matière organique: 60 à 80% sont constitués de carbone, 3 à 8% de micro-organismes, 3 à 8% de composants non humiques et 10 à 30% de composants humiques.
Selon ce chercheur, sur un hectare, l’augmentation de 1% de matière organique dans le sol permet le stockage de 15 tonnes de carbone supplémentaires auxquelles s’ajoutent les nutriments dans le sol (1400kg d’azote, 140kg de phosphore, 140kg de potasse et 140kg de souffre) et à la disponibilité en eau (+200.000 litres). « Cette augmentation du stockage de carbone dans les sols se monnaye entre 600 et 1000$ par hectare aux États Unis« , indique l’ingénieur de l’Ohio qui a mis au point un calculateur de taux de matière organique dans les sols pour déterminer et suivre l’évolution de la matière organique des parcelles. Il est téléchargeable gratuitement dans sa nouvelle version http://go.osuedu/somcalculator
Et pour les allergiques à la langue de Shakespeare, l’association Agro-Transfert a développé un outil gratuit dans sa version démo simeos-amg.org.