Rendement du maïs : où se perdent les quintaux ?

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Rendement du maïs : où se perdent les quintaux ?

Pour exprimer le plein potentiel de la génétique, le producteur de maïs doit maîtriser tout une somme de détails, qui ont un impact et se cumulent. Le semis, la fertilisation et la protection sont importants.

Le rendement potentiel d’une variété de maïs annoncé au catalogue est rarement atteint en conditions réelles. Comment s’explique ce rendez-vous manqué ? Et surtout que faire pour rectifier le tir ? Le point avec Christian Jenn de la Coopérative agricole de céréales de Colmar.

À la Coopérative agricole de céréales de Colmar (Groupe CAC), on est un peu obnubilé par la performance technico-économique des productions, notamment celle du maïs. On y pratique des essais variétés depuis plus de trente ans. Egalement des expérimentations techniques. Il y a en permanence une recherche de nouvelles solutions agronomiques et technologiques. On expérimente tout pour accompagner les agriculteurs sur le chemin de l’excellence. Alors, quand on interroge Christian Jenn, responsable recherche-développement innovation, sur les raisons de la perte de quintaux entre le potentiel de rendement d’un maïs et la réalité de terrain et comment y remédier, il a des choses à dire ! « Il n’existe pas d’itinéraire technique idéal pour toutes les situations. En revanche, il y a un optimum pour chaque parcelle en tenant compte de l’hétérogénéité du sol », annonce-t-il.

Rendement du maïs : le bonus se traduit en euros

Le rendement du maïs peut varier du simple au double entre les différentes zones d’une même parcelle. Ce constat a poussé la Coopérative à expérimenter la modulation intraparcellaire de la densité de semis.

« En Alsace, il est courant de trouver cinq types de sol différents sur une même parcelle. » Ainsi, si une zone présente une réserve utile de 40 mm, « on peut très bien trouver 200 mm à un autre endroit. L’agriculteur est gagnant à augmenter ou à diminuer la dose selon les zones. »

Pour Christian Jenn, la modulation de la densité s’accompagne d’un gain de rendement de 10 à 20 q. Cela représente un bonus net de 100 à 140 €/ha pour l’agriculteur.

Moduler la variété dans la parcelle

Il est aussi intéressant de moduler la variété dans la parcelle. Certaines donnent de meilleurs résultats dans des limons argileux, d’autres dans des sables. Chaque variété exprime un potentiel propre dans les différents sols. « Avec l’expertise des essais variétés, nous pouvons conseiller de semer 70 % d’une variété dans la zone de sol profond et 30 % d’une autre là où le sol est léger. »

La vitesse de semis impacte le rendement. « Au-delà de 4 km/h on perd des quintaux », précise le responsable recherche du CAC. Dans les sols avec cailloux et mottes, il est d’autant plus important d’adopter une vitesse lente. Quant à la régularité du semis autant en écartement qu’en profondeur, elle est essentielle. « On peut observer le même peuplement sur deux parcelles et au final constater un écart de rendement de 10 q/ha à cause d’une mauvaise répartition des plantes sur le rang et une hétérogénéité à la levée. » En cause, un semoir mal réglé qui ampute une partie du potentiel. Les affirmations de l’expert invitent donc les détenteurs de semoir monograine à prendre le temps d’ausculter assez régulièrement leur outil.

Des quintaux à gagner

Des quintaux sont aussi à gagner sur la date de semis. Les agriculteurs ont tendance à retarder le semis pour bénéficier de sols bien réchauffés. Or, les essais CAC montrent que certaines parcelles moins exposées au froid pourraient être semées une dizaine de jours plus tôt. Elles généreraient ainsi un gain de rendement. Mais un tel choix modifie d’autres paramètres. « La levée est plus lente. Le semis doit donc s’associer à un antitaupin dans les parcelles à risques. » Cela renforce une certitude. Il n’existe pas de recette miracle, il faut affiner l’itinéraire technique au cas par cas !

Préférez le désherbage de pré-levée

Les essais désherbage révèlent que la nuisibilité des adventices atteint en moyenne 63 q/ha. La tendance actuelle est d’appliquer un herbicide de post-levée précoce. «Peut-être que sur une parcelle propre, c’est suffisant. » Mais plus l’intervention est retardée, plus le rendement est impacté.

Par rapport à une application de pré-levée, le potentiel de rendement perd «10 q/ha avec un post-levée pour une même efficacité de traitement». Christian Jenn poursuit : «On perd 10 q/ha supplémentaires au stade cinq feuilles, et dix autres au stade huit feuilles.»

Attention au type de désherbant

Le manque de sélectivité du désherbant peut aussi grignoter le potentiel. « On peut perdre 25 % alors que visuellement on ne constate rien dans la parcelle. » Inversement un programme peut provoquer des signes de phytotoxicité, sans pour autant affecter le rendement. « Les plantes supportent plus ou moins bien en fonction de leur génétique. » Là aussi, une connaissance fine des variétés et de leur comportement face aux matières actives permet d’affûter le désherbage et d’optimiser la récolte.

L’engrais pour démarrer

L’engrais ‘starter’ auparavant se réservait aux situations froides, pour pallier le risque de démarrage difficile. Son emploi se généralise. Et c’est tant mieux ! « C’est le premier apport d’azote. Une impasse équivaut à une perte de 10 à 12 q. » L’optimum est fixé à 100 kg de 18-46. « Si l’on apporte plus, développe Christian Jenn, il n’y a pas de gain de rendement. En revanche, apporter moins entame le potentiel. »

Il faut donc appliquer la juste dose au bon endroit. Les granulés doivent être placés à 5 cm de la raie de semis et à une profondeur de 5 cm sous la graine pour que les racines accèdent sans effort aux nutriments. «Un placement décalé de l’engrais coûte 5 q ! La charge d’intrant est identique mais le résultat n’est pas le même ! » Quant aux nouvelles formes d’engrais azotés, si elles permettent d’économiser quelques kilos, elles sont souvent plus chères. « Au final, pour un rendement identique, le coût de la fertilisation n’a pas baissé. »

Halte aux nuisibles !

Question protection des cultures, là non plus, pas de place au hasard. Christian Jenn constate que les populations de taupins augmentent. Elles s’étendent à de nouveaux biotopes. « On les retrouve non plus uniquement sur les parcelles froides, mais aussi dans les sols caillouteux qui se réchauffent vite. » Une attaque de taupin sur 5 % du peuplement engendre une baisse de rendement de 8 à 10 q / ha. « Pourtant, une attaque de 5 %, ça ne saute pas aux yeux ! »

Un rendement du maïs moindre qu’attendu

Une réduction de la dose d’insecticide pour quelques euros économisés peut, au final, coûter cher à la fin de la campagne. La mise en garde vaut également pour le risque pyrale. « L’impasse de traitement conduit à une nuisibilité de 6 à 15 q. »

On l’aura compris, quelques quintaux perdus par ci, d’autres grignotés par là, et le producteur se retrouve avec un rendement relativement éloigné de ce que le catalogue l’autorisait à espérer.

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