A Bessay-sur-Allier, le cover-crop suivi d’un passage de semoir ne satisfait plus Jean-Christophe Theuil et ses collègues à la cuma des Fonds. La profondeur de travail est jugée trop importante : 7-8 cm au minimum, ce qui est bien trop pour semer une graine de culture intermédiaire. Cela représente de l’énergie dépensée et du temps passé puisque le passage de semoir est incontournable.
Outil chimère
Il y a 6 ans, ils sont séduits par le Disc-o-mulch, équipement un peu chimère. Il assemble des grosses dents de chisel qui délivrent de la souplesse, au bout de celles-ci des disques de type cover-crop pour le soulèvement de la terre et la tôle déflectrice de la herse rotative. Le tout est répété deux fois tandis qu’un semoir pneumatique introduit les graines entre les deux trains dents-disques.
Enfin, un rouleau-barre lourd rappuie le sol, un mulch est formé en surface. Utilisé surtout pour le sorgho, le ray-grass et les CIPAN(1), le semis est réalisé très rapidement : 3 ha à l’heure, à une vitesse de 10 km/h (voire 14-15), soit 25 ha/ jour. Mais si le rendement de chantier est conséquent, le plus délicat est de choisir son moment d’intervention : surtout, des sols pas trop secs ! Le plus difficile serait de ne pas aller travailler pendant que les autres y sont déjà…
Il s’agit d’attendre les conditions optimales et, à ce moment, semer vite. Pour autant, cette exigence ne provoque pas de tension entre les 5 adhérents. Les capacités de travail rassurent. Jusque-là, aucun semis n’a été raté, à condition qu’il pleuve bien sûr, comme pour tous les semis. Engagés sur 1 100 ha de SAU, le Disc- o-mulch revient à 15 €/ha de travail. Un 130 ch seulement est nécessaire pour le tracter, ce qui ne revient pas très cher pour un semis de culture intermédiaire.
Vivre avec les vers de terre
Au Bouchaud, quatre adhérents de la cuma du Minat ont opté pour une solution encore plus minimaliste quant à la quantité de terre travaillée : un triangle de 1 cm de côté seulement est remué. Au fond de celui-ci, la graine est posée, celle des CIPAN comme celle des cultures. Entre deux rayons ? Rien n’est touché !
Pascal Girard en est convaincu : « Dans nos sols de limons battants, qui se prennent en masse, on passe notre temps à casser des mottes, c’est un éternel recommencement. Laissons les vers de terre travailler et favorisons leur vie, leur développement. Ils viendront manger les résidus en surface, creuseront des galeries tandis que nous ne chamboulerons pas le sol (leur habitat) tous les ans. »
Maintenant que le travail est minimal, le tassement de sol (roulage de benne) est bien sûr à éviter, sinon, un décompactage est incontournable. Quant aux graines d’adventices, l’idée n’est pas de les faire germer par un déchaumage, mais de les laisser en surface dépérir. Aucun salissement particulier n’est remarqué chez lui au bout de 2 ans de cette méthode, d’autres ont davantage de recul.
En outre, le temps de travail est divisé par quatre, le gasoil par deux, mais pour réussir dans cette technique, il faut être davantage observateur, plus pointu, estimer l’humidité et repérer le moment opportun. « Prendre la bêche avant de prendre le tracteur », sourit Pascal Girard, qui déclare retrouver ainsi un grand intérêt à son métier, heureux de prendre conscience de la vie du sol et de travailler avec. Il songe à vendre sa charrue…
(1) Cultures intermédiaires pièges à nitrates.
Retrouvez l’intégralité de l’édition spéciale départementale Allier parue en juillet 2017 :