Sans la cuma, comment s’en sortirait l’exploitation ? La vérité en chiffres

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Sans la cuma, comment s’en sortirait l’exploitation ? La vérité en chiffres

Une exploitation a accepté d'ouvrir ses comptes et d'analyser comment elle s'organiserait si elle ne devait pas recourir à la cuma. Et surtout quels seraient les coûts associés.

Une exploitation s'est soumise au défi lancé par la fédération des cuma du Tarn-et-Garonne. Elle a ouvert ses comptes, décortiqué ses factures de cuma, mais aussi de prestations, toutes ses charges pour voir comment elle s'en serait sortie au fil des ans sans la cuma. Verdict. 

Cette exploitation du Tarn-et-Garonne est en phase de reprise. Son statut d’Earl abrite deux associés et un conjoint-collaborateur. Ses 120 hectares lui permettent de sortir un chiffre d’affaires reposant à 50% sur des productions végétales (céréales, maïs-semence, pommes de terre) et animales (8v300 volailles par an). Elle possède ses propres salles de gavage et d’abattage. Elle travaille aujourd’hui avec deux cuma, dont une de manière très étroite. Cette cuma voit le jour en 1985 et l’exploitation y a adhéré dès le départ, principalement pour pouvoir accéder à un tracteur de forte puissance (120 ch à l’époque). Les factures des cuma, pour un total de 11 300 €, représentent 6,4 % du chiffre d’affaires total sur l’année 2023. La cuma apporte différents matériels et services à l’exploitation, de l’implantation des cultures, à la récolte, en passant par les travaux de manutention pour l’activité d’élevage. On revient sur les coûts en cas d’activités sans cuma pour les agriculteurs.

Activités sans cuma ? Deux stratégies se dégagent

Pour affiner la démarche, l’équipe de la fédération, avec les agriculteurs, a élaboré deux stratégies qui permettraient à l’exploitation de continuer son activité sans cuma.

  • En individuel, plus petit et/ou plus vétuste

De l’investissement en individuel, en privilégiant les occasions fiables. C’est la stratégie qu’auraient sans doute privilégiée les exploitants, pour les matériels indispensables, tracteur en tête. En s’orientant vers des matériels de plus petits gabarits.

  • Des choix et des restrictions

Sans la cuma, les matériels utilisés pour l’entretien du bâtiment ne serviraient qu’au coup par coup, en location. La disponibilité serait moindre, mais certaines années, ces matériels ne seraient pas facturés à l’exploitation. C’est aussi le cas pour l’effeuillage qui serait délégué à l’entreprise semencière.

Dans le détail, comment s’en sortirait cette exploitation sans la cuma?

L’équipe de la fédération, avec Entraid, a fait détailler aux agriculteurs leurs stratégies d’équipement si la cuma n’avait pas existé sur ce secteur.

Voici les résultats et les chiffrages qui en découlent.

Sans la cuma, il faut souvent se tourner vers du matériel d'occasion

Dans l’ensemble, la cuma fournit des matériels récents et bien équipés.

Travail du sol : de 2 457 € à 3 045 €/an

La ferme utilise du matériel de travail du sol :

  • Cracker,
  • Déchaumeur,
  • Herse étrille,
  • Charrue 5 corps.

Sans la cuma, le matériel de travail du sol aurait été acheté de manière échelonnée dans le temps, certains matériels seraient présents et déjà amortis. Les agriculteurs n’ont pas connaissance d’entreprises de travaux agricoles suffisamment équipées pour le travail du sol sur le secteur, et cette activité aurait été conservée en propre.

Dans le travail, la durée d’amortissement des matériels est très longue (15 ans). On les dévalue afin de minorer leur coût.

Sans la cuma, le travail du sol aurait coûté bien plus cher

Tracteur et télescopique : de 5 453 € à 11 975 €/an

L’exploitation adhère à la cuma pour 350 heures de traction par an. Le renouvellement du tracteur a eu lieu fin 2023, pour un John Deere de 195ch. L’Earl s’engage également sur un télescopique JCB, renouvelé en décembre 2023. Dans l’ensemble ? Des matériels de qualité, récents et équipés pour un bon confort de travail.

Sans la cuma, un tracteur en occasion récente aurait été acquis (première main, environ sept ans, soit 3 000 heures). Il serait absolument nécessaire d’avoir ce matériel en propre pour réaliser les 350 h/an. Ce matériel est accessible moyennant un investissement d’environ 100 000 €, amorti sur dix ans (relativement long pour du matériel d’occasion), avec une charge d’entretien d’environ 3,50 €/h réalisée (barème Entraid). Pour 350 heures, ce tracteur aurait coûté 10 000 € + 1 225 € d’entretien par an, soit 11 225 €/an.

Pour pallier l’absence de télescopique, un tracteur déjà présent sur l’exploitation aurait été équipé d’un chargeur frontal (15 000 € HT, en partie amorti). Et pour éviter l’investissement sur un télescopique, la charge annuelle s’estime à 750 € (15 000/20 ans).

Total du poste : 11 975 €.

Épandage : de 360 € à 2 300 €/an

La cuma propose un épandeur Deguillaume acheté en 2020. La facture annuelle pour l’EARL est de 360 €, car beaucoup d’adhérents utilisent cet outil. Les associés peuvent épandre sur les 40 ha de l’exploitation.

Sans la cuma, pour assurer l’activité, les associés auraient recours à une entreprise de travaux agricoles. Les tarifs donnés sont à environ 65 €/ha, soit 2 300 € pour l’exploitation.

Activité maïs semences : de 787 € à 5 080… sans l’effeuillage !

Aujourd’hui, la cuma gère une partie des opérations de l’activité maïs semences. Ce sont l’enjambeur et la coupe de la cuma qui réalisent la castration, de même que l’effeuillage. En revanche, l’établissement en direct réalise la récolte, et le coût est intégré au produit de la récolte.

Sans la cuma, l’activité serait compliquée à mener sur une petite surface comme actuellement (18 hectares). Pour la castration, la seule solution serait l’acquisition d’une machine d’occasion relativement ancienne pour 40 000 € environ, amortie sur 15 ans (2 600,00 €/an pour l’amortissement), avec un entretien annuel estimé à environ 500 € en moyenne.

Côté effeuillage, un appel à une entreprise spécialisée aurait été nécessaire. Sinon, il aurait été possible de ne pas effeuiller le maïs, mais en acceptant une rémunération moindre de la part des établissements. En termes de récolte globale, la facture tournerait à 110 € / ha au minimum (1 980,00 €).

Coût total : 5 080 € en supprimant l’effeuillage !

Verdict. Un bilan plus lourd pour les activités sans cuma

Bilan des charges avec et sans la cuma

Un meilleur excédent brut d’exploitation

Sans la facture de la cuma, l’excédent brut d’exploitation (EBE) du domaine agricole est logiquement meilleur. En effet, il ne reste plus que les activités en prestation par une ETA (travaux et services, -6800€) ainsi que les frais d’entretien (entretiens et réparations (+1700€).

L’exploitation génère une trésorerie plus élevée que celle réalisée avec la cuma.

Un résultat courant en baisse

Une nouvelle charge bien plus importante remplace la cuma : l’amortissement du matériel (+16 500 €). En effet, l’acquisition de matériels en propre, même d’occasion, génère une charge importante, d’autant plus que les volumes d’utilisation restent modestes.

La charge liée au tracteur et au chargeur frontal, même d’occasion « pèsent » à eux seuls autant que le total de la facture de la cuma!

Activités sans cuma : explosion de l’endettement

Le point le plus important est que les activités sans la cuma, l’endettement de l’exploitation aurait explosé (+200 000€ pour acquérir le tracteur, le chargeur et la castreuse).

Pour plus d’information, retrouvez aussi ces articles sur www.entraid.com :

Sélectionner deux matériels de la même famille pour les comparer